Voué au démon dès son bas âge, Cyprien passait pour le plus habile magicien de son temps.
Or, il y avait à Antioche une vierge convertie avec sa famille et fiancée au Christ. Justine était son nom. Aglaïdas, un avocat de la cité, conçut le vif désir d’en faire son épouse ; mais vainement lui demanda-t-il sa main : «J’ai au ciel un Époux, » avait répondu la jeune fille ; « il me gardera sans tache jusqu’au jour de son avènement. » Voyant ses avances toujours repoussées, il va trouver Cyprien et lui promet deux talents d’or s’il peut, par ses maléfices, lui gagner le cœur de Justine. Le sorcier y emploie tout son art, mais la vierge chrétienne demeure toujours victorieuse des charmes et des séductions diaboliques. Le magicien finit par s’emporter contre le démon : « Quoi ! » lui dit-il, « avec toute ta puissance tu ne peux pas même avoir raison d’une jeune fille ? » Satan, la rage au cœur, lui répond : « J’ai vu un signe qui m’a fait trembler : j’ai vu le signe du crucifié ; aussitôt j’ai pris la fuite. » — « Il est donc plus grand que toi, ce crucifié ? Si son ombre suffit pour te vaincre, que feras-tu pour nous arracher de ses mains lorsqu’il viendra lui-même pour punir ? Fuis donc loin de moi, artisan de mensonge ! Le Dieu de Justine sera le mien ! »
Cyprien tiendra parole. Il connaissait un prêtre, nommé Eusèbe. Il va se jeter dans ses bras et, fondant en larmes : « Votre Dieu est le vrai Dieu, » lui dit-il ; « je désire être son serviteur, mais voudra-t-il d’un scélérat tel que moi ?» Eusèbe l’accueille, le rassure et l’instruit. Les démons mettent tout en œuvre pour empêcher cette conversion, mais le magicien désabusé a recours au signe de la croix et triomphe de l’enfer par le nom de Jésus.
Justine remerciait Dieu de tant de grâces. Frappée du désordre innocemment causé par sa beauté, elle se coupa les cheveux, vendit ses bijoux au profit des pauvres, détermina ses parents à faire de leur maison une église, et devint dans la suite abbesse d’un monastère.
Aglaïdas lui-même, converti, distribua ses biens aux indigents et se donna tout à Dieu.
Cyprien fit des progrès rapides dans les voies du salut ; il était si humble et si fervent que l’évêque d’Antioche lui conféra le sacerdoce, et, seize ans plus tard, le consacra pour son successeur.
Le nom de Cyprien avait trop d’éclat, son histoire avait eu trop de retentissement, pour qu’il demeurât en paix dans la persécution. Sous celle de Dioclétien, le gouverneur de la Phénicie, Eutolme, le fit arrêter, tandis qu’on saisissait la vierge Justine à Damas. Ils furent conduits à Tyr, où l’on déchira le pontife avec des crocs de fer et la vierge à coups de fouets. Quelques jours plus tard, on les tira de leur cachot pour les jeter dans une chaudière remplie de poix bouillante ; mais le liquide brûlant respecta les deux martyrs. Le juge, étonné de ce miracle, s’écria : « Elle est donc invincible la puissance du Christ !» Et il ne savait que faire. « Garde-toi de rien entreprendre contre ces saints, » lui dit un de ses parents ; « mais envoie-les à l’empereur avec un rapport de ce qui est arrivé. » Dioclétien, qui se trouvait à Nicomédie, prononça contre eux la sentence capitale, et leur tète tomba sous le glaive du bourreau, le 26 septembre 304.
RÉFLEXION PRATIQUE
Armez-vous du signe de la croix, invoquez fréquemment le nom de Jésus, et vous triompherez de toutes les attaques de l’esprit des ténèbres.