Celui qui devait fonder l’ordre illustre des frères prêcheurs et la pieuse dévotion du Rosaire, Dominique, vint au monde l’an 1170, à Calahorra, dans la Vieille-Castille.

Son père, Félix de Guzman, était un grand d’Espagne. Sa mère, Jeanne d’Aza, était une sainte. On connaît le songe qu’elle fit avant la naissance de Dominique : le dogue portant à la gueule un flambeau était le symbole du courageux missionnaire qui, par lui-même et les siens, portera chez toutes les nations la lumière de l’Évangile. L’enfant prédestiné reçut la plus chrétienne éducation. Envoyé, dès l’âge de quatorze ans, à l’université de Palencia, il y fit de brillantes études. Ses progrès dans la perfection ne furent pas moins remarquables. D’une pureté angélique, il s’exerçait nuit et jour à la prière, macérait son corps par les pénitences, parlait peu et couchait sur une planche ou à plate terre. Lorsque l’Espagne éprouva les horreurs d’une cruelle famine, le jeune étudiant vendit ses biens, ses livres mêmes pour secourir les malheureux. Que dis-je ? il poussa le dévouement jusqu’à s’offrir comme esclave aux Maures d’Afrique à la place d’un prisonnier dont les bras étaient le seul soutien de sa famille.

A peine Dominique avait-il pris ses degrés qu’on le chargea d’expliquer l’Ecriture et d’évangéliser le peuple. Un célèbre hérésiarque fut le fruit de sa première mission. A la seconde, les églises ne purent contenir la foule de ses auditeurs : il prêcha sur les places et dans les champs. Un jour qu’il annonçait la parole de Dieu sur les bords de la mer, des pirates s’emparèrent de lui et le maltraitèrent. Lui, pour les récompenser, les sauva d’un naufrage certain pendant une horrible tempête, et les convertit tous à Jésus-Christ. Dominique ne fut plus, dès lors, l’homme d’un diocèse, mais de toute l’Espagne. Il parcourut les royaumes de Castille et d’Aragon ; ses discours, pleins d’ardeur et d’éloquence apostolique, retentirent jusqu’au fond des âmes et opérèrent partout des conversions sans nombre.

L’évêque d’Osma l’avait fait entrer dans le chapitre de sa cathédrale. Chargé par le roi de Castille, Alphonse IX, d’une importante mission en France, le prélat se fit accompagner par le jeune chanoine. En traversant le Languedoc, les deux voyageurs furent témoins des ravages de l’hérésie. Par leur doctrine fataliste qui ouvrait la porte à tous les désordres, et encore plus par leurs violences et leurs excès, les albigeois semaient partout le trouble et la désolation. L’évêque d’Osma et Dominique se rendirent auprès du pape Innocent III, obtinrent la permission de travailler à la conversion des hérétiques et retournèrent en Languedoc (1207). De ce moment, notre saint se consacra tout entier à sa noble entreprise. Les continuateurs fanatiques de Manès, enorgueillis du soutien que leur prêtait le comte de Toulouse, portaient la guerre chez leurs voisins, pillaient les églises et massacraient les prêtres. Dominique résolut d’arrêter ce torrent dévastateur, et ses discours amollirent des âmes que l’éloquence de Saint Bernard, un demi-siècle avant, n’avait pu ébranler. Il tint des conférences avec les docteurs de l’hérésie, et appuya parfois la doctrine catholique sur l’indiscutable autorité de miracles éclatants. Ne le vit-on pas, dans la réunion de Fanjeaux, recourir au jugement de Dieu ? Une courte exposition de la foi avait été rédigée par l’apôtre ; il la mit entre les mains de ses adversaires pour être livrée aux flammes, à la condition qu’ils tiendraient pour fausse leur propre doctrine si le feu épargnait son manuscrit. L’épreuve fut publiquement répétée trois fois, et trois fois l’on retira les feuillets intacts du milieu d’un brasier ardent, où venaient de se réduire en cendres les écrits de ses contradicteurs.

Cependant les controverses, comme il arrive d’ordinaire, n’avançaient pas beaucoup la conversion des sectaires. Alors Dominique s’adresse à la Mère de Dieu et la prie instamment de combattre avec lui les ennemis de son Fils. Un jour la Vierge lui apparaît dans sa chapelle de Rouille, et lui déclare que la salutation angélique sera le principe de la conversion des albigeois, comme elle le fut jadis de la rédemption du monde; et qu’en prêchant le rosaire, qui contient 150 Ave Maria, il verra les pécheurs se convertir par milliers. Sans s’arrêter davantage aux disputes, le missionnaire annonce les grandeurs et les mérites de la Reine du ciel, et propage la dévotion du chapelet.

Le meurtre de son légat Pierre de Castelnau avait décidé le pape Innocent III à ordonner une croisade contre les sectaires (1208). Dominique suspendait parfois ses courses pour instruire les soldats du Christ et leur apprendre à réciter le rosaire. Grâce à lui les armées de la bonne cause firent des prodiges : cent catholiques chassèrent trois mille albigeois ; cinq cents passèrent sur le corps de dix mille de ces fanatiques ; la plupart des villes du Languedoc et du comté de Toulouse tombèrent facilement aux mains des croisés ; avec deux ou trois mille guerriers, Simon de Montfort tailla en pièces, à Muret, cent mille hommes venus pour assiéger cette place ; Toulouse elle-même fut obligée de se rendre et de recevoir les instructions de l’homme de Dieu.

Jusqu’alors Dominique avait toujours porté l’habit et suivi la règle des chanoines de Saint Augustin ; mais il éprouvait un désir ardent de ressusciter l’esprit apostolique parmi le clergé, en instituant un ordre religieux dont les membres se prépareraient, par la retraite et les fortes études à dissiper l’erreur et à répandre les lumières de la foi. C’est à Toulouse qu’il jeta les premiers fondements de son institut. Innocent III, qu’il vit au concile de Latran, l’encouragea dans son pieux dessein, et Honorius III approuva le nouvel ordre sous le nom de frères prêcheurs (1216). A peine fut-il confirmé, qu’on vit ses religieux se répandre de toutes parts, triompher de l’hérésie et porter en tous lieux la réformation des mœurs. Toulouse, Metz, Paris, Venise, reçurent des colonies de dominicains ; bientôt ils couvrirent de leurs établissements l’Italie, l’Espagne, la France, l’Angleterre , la Pologne et les pays du Nord. Le saint fondateur parcourut, à plusieurs reprises, la France, l’Espagne, l’Italie, prêchant partout avec succès, partout semant les prodiges, ressuscitant même les morts, et renouvelant les merveilles des premiers siècles de l’Église.

Un jour il eut à Rome une vision. Le Sauveur lui apparut irrité contre les pécheurs, prêt à les livrer à la justice de son Père. Marie, la Mère des miséricordes, lui présenta deux de ses fidèles serviteurs, dévoués à lui ramener les âmes et obtenir leur grâce. Quelques heures après, il rencontra François d’Assise : c’était bien le saint homme que la Reine du ciel avait présenté à Jésus avec lui. Dès ce jour commença l’étroite liaison de ces deux grands patriarches, qui se prolongera dans leurs fils spirituels, notamment, à l’université de Paris, entre Saint Thomas d’Aquin et Saint Bonaventure.

Les travaux, les fatigues, les austérités, les ardeurs de l’amour divin, avaient usé la santé de Dominique. Il connut l’heureux moment qui devait commencer pour lui le repos et le bonheur. Sa dernière maladie ne fut pas longue ; il expira sur la cendre, à Bologne, le 6 août 1221, jeune encore, mais plein de mérite et de gloire. Il avait refusé plusieurs fois d’être évêque pour consacrer toutes ses forces à sa double tâche de missionnaire et de fondateur d’ordre. Sa grande famille, appelée autrefois en France les jacobins, a rendu d’immenses services à l’Église, et compte une longue série d’hommes illustres, depuis Albert le Grand et Saint Thomas jusqu’au P. Lacordaire.

RÉFLEXION PRATIQUE

Avec le rosaire, Saint Dominique a converti les pécheurs par centaines de milliers. Cette dévotion est toujours efficace : aimons donc à égrener pieusement chaque jour notre chapelet.

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