Jérôme, né vers 331, à Stridon, sur les confins de là Dalmatie et de la Pannonie, va de bonne heure étudier les belles-lettres à Rome, sous la direction du célèbre grammairien Donat et de l’orateur Victorin.

Il se fait bientôt remarquer par la profondeur de son jugement, la vigueur de son intelligence et l’éclat de son imagination ; mais en même temps il s’abandonne aux séductions de la grande ville. Pour le soustraire à ses dangereux entraînements, son père l’envoie à Trêves. Là commence pour lui l’œuvre transformatrice de la grâce. Aquilée, où Jérôme reçoit les conseils du saint et savant évêque Valérien, achève sa conversion. Résolu de renoncer au monde, il va faire un premier essai de la vie solitaire dans les sauvages campagnes de son pays natal ; mais c’est vers l’Orient, cette terre des grands cénobites, que sa vocation le pousse : il gagne Constantinople, traverse le Pont, la Bithynie, la Galatie, la Cappadoce, séjourne à Antioche chez le prêtre Évagre, se rend au désert de Chalcide, et se fait admettre parmi les moines de l’abbé Théodose, dont il partagera désormais les jeûnes et les travaux.

Cependant le démon ne peut se résoudre à lâcher une si belle proie. Il poursuit le fugitif jusqu’au fond des solitudes pour lui rappeler sa vie mondaine à Rome, et réveiller dans son imagination tous les fantômes qui l’avaient captivé. Mais l’athlète du Christ, loin de se laisser abattre, redouble d’austérités : « Je me tenais à l’écart des hommes, » a-t-il écrit lui-même, « parce que mon âme était remplie d’amertume. Le sac dont j étais couvert avait rendu mon corps si hideux qu’il faisait horreur aux autres, et ma peau devint si noire qu’on m’eût pris pour un Éthiopien. Je passais des jours entiers à verser des larmes, à jeter des soupirs, et quand, malgré moi, j’étais obligé de céder au sommeil qui m’accablait, je laissais tomber sur la terre nue un corps tellement décharné qu’à peine les os tenaient les uns aux autres. »

Saint Jérôme étudie avec ardeur les saintes Écritures. Afin d’en comprendre le texte original, il prend d’un solitaire juif des leçons d’hébreu, et se prépare ainsi à nous donner la Vulgate, seule version de la Bible déclarée authentique par l’Église.

Une légende raconte qu’un jour il voit entrer dans sa cellule, l’œil en feu, la gueule béante, un grand lion, traînant une de ses pattes qui laisse derrière lui une trace de sang. Jérôme s’en approche, le caresse, panse sa plaie, et le terrible animal se dévoue à lui comme un esclave.

Après quatre ans, des moines schismatiques expulsent Jérôme de sa solitude. Alors il visite Jérusalem et les monastères de la Palestine, retourne à Antioche, où il consent à recevoir l’onction sacerdotale, et rentre dans Bethléem pour y passer trois ans, uniquement occupé à la méditation et à l’étude. La haute réputation de saint Grégoire de Nazianze l’attire ensuite à Constantinople, mais il reprend bientôt le chemin de son désert. Saint Paulin et saint Épiphane l’entraînent à Rome, et le pape Damase en fait son secrétaire. Alors le génie et la sainteté de Jérôme brillent du plus grand éclat. On recourt à sa science de toute parts. Sous son impulsion, des réunions ascétiques, composées de vierges et de veuves, se forment autour de plusieurs femmes illustres, Albine, Marcelle, Paule, Eustochium. Devant cet auditoire d’élite le grand docteur commente les passages difficiles de la Bible ; son influence transforme la haute société romaine, et l’on voit les dames les plus illustres quitter les attraits du siècle pour une vie cachée et retirée en Jésus-Christ.

Après la mort du pape Damase, la jalousie persécute l’ancien solitaire par des accusations calomnieuses. Il pourrait aisément, de son éloquence brûlante, foudroyer ses misérables adversaires. Il se contente de quitter Rome et de regagner l’Orient. Il part avec son jeune frère Paulinien, revoit saint Épiphane à Salamine et saint Paulin à Antioche, vient dans Alexandrie se faire l’humble disciple de l’illustre aveugle Didyme, et retourne dans sa chère solitude à Bethléem.

De nombreux disciples accourent autour de l’illustre cénobite ; il fonde un monastère d’hommes dont il prend la direction, et un monastère de femmes qu’il confie à sainte Paule, cette illustre patricienne venue de Rome chercher un refuge près de son père spirituel. Au lieu d’occuper son temps à tresser des corbeilles, comme les solitaires de la Thébaïde, le docteur continue à étudier l’hébreu, le chaldaïque, le syriaque, consulte les grands rabbins de la Palestine, et achève sur les textes originaux la traduction de la Bible.

Jérôme avait choisi une grotte spacieuse, non loin de son monastère, pour en faire sa cellule de travail et de méditation. Il y vécut trente-quatre ans, n’usant que d’une nourriture grossière, dont le vin et la viande étaient exclus, sauf le cas de maladie, regardant comme une rupture du jeûne de manger avant le coucher du soleil. Ses heures de prière étaient réglées. Quant aux heures de travail, il les prenait aussi bien sur la nuit que sur le jour. Il avait aussi ouvert une école pour les enfants de Bethléem, et il y enseignait lui-même le latin et le grec. Les luttes de l’origénisme et du pélagianisme lui suscitèrent de dures épreuves, mais sa vertu, ses travaux et la sainte amitié de Paule et d’Eustochium le soutenaient et le consolaient. Pelage, qui ne pouvait répondre par des arguments solides à la dialectique puissante de Jérôme, employa la violence pour se débarrasser de son contradicteur. Une bande de brigands soudoyés par cet hérétique ravagèrent les deux couvents de Bethléem et y mirent le feu. Échappé à ce danger, notre saint put jouir quelque temps d’un repos toujours actif, malgré la vieillesse et les infirmités.

Il expira, presque nonagénaire, le 30 septembre 420, et fut enterré dans une grotte où l’on voit encore aujourd’hui son nom gravé sur le rocher.

RÉFLEXION PRATIQUE

Dans une maladie grave qui le conduisit aux portes du tombeau, comme il le raconte lui-même, saint Jérôme se vit aux pieds du souverain Juge, qui lui reprocha d’être un disciple de Cicéron plutôt qu’un chrétien.Vigoureusement flagellé par ordre du Seigneur, il fit alors cette promesse : « Si désormais je prends un livre profane, si je le lis, je consens à être traité comme un apostat. » Que de chrétiens méritent le même reproche ! Ils savent par cœur Cicéron, Tacite, Horace, Virgile et Homère, mais ils n’ont souci de connaître l’Évangile. Étudions davantage notre religion et ses saints Livres.

Panier

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