Ignace (Inigo), onzième enfant de Bertrand Yanez, seigneur de Loyola, naquit dans une étable, où sa mère, Saenz de Balde, s’était fait porter, en mémoire de l’enfantement de la Vierge.

Il devint par ses brillantes qualités l’idole de ses parents, qui l’envoyèrent à la cour du roi Ferdinand d’Aragon. La passion de la gloire entraîna le jeune seigneur dans la carrière des armes, où il mena la vie dissipée des cavaliers de son temps. Chargé de défendre Pampelune contre les Français (1521), il eut la jambe cassée par un boulet de canon. Un os laissé en saillie sous le genou par les chirurgiens l’eût empêché de porter la botte avec grâce ; il le fit scier, et comme la jambe s’était raccourcie, il voulut qu’on tentât de l’allonger au moyen d’un appareil. Mais les efforts n’aboutirent pas, et Ignace resta boiteux. Condamné à un long repos, il chercha des distractions dans la lecture, et, faute d’autres livres, il lut les Vies des saints. L’austérité des solitaires, le courage et la patience des martyrs, enthousiasmèrent sa noble âme : il résolut de les imiter.

Ses premiers pas dans la voie de la pénitence furent des pas de géant. Il se ceignit les reins d’une chaîne de fer, prit un cilice, mendia de porte en porte, et servit les malades dans les hôpitaux. Il jeûnait tous les jours au pain et à l’eau, passait les nuits en oraison et se disciplinait jusqu’au sang. Pour l’encourager, la Sainte Vierge lui apparut une nuit dans un rayon de lumière, tenant entre ses bras l’Enfant Jésus. Il se rendit alors en pèlerinage à Mont-Serrat, suspendit son épée à l’autel, se déclara chevalier de Marie, fit vœu de chasteté, donna ses habits à un pauvre, prit une robe de toile, s’en alla tête et pieds nus à Manrèze, et s’enferma dans une affreuse caverne, où, au milieu des inventions de la plus dure pénitence, il composa son admirable livre des Exercices spirituels. Ses austérités excessives faillirent lui coûter la vie. On le transporta demi-mort à l’hôpital. A cette époque, suivant ses historiens, il fut favorisé de grâces extraordinaires, telles que des ravissements, des extases dans la prière et une connaissance surnaturelle des mystères de la foi.

Après dix mois de retraite à Manrèze, Inigo s’embarque pour la Palestine, prend terre à Gaëte, reçoit la bénédiction du pape, et arrive le 4 septembre 1523 à Jérusalem. Il se met à prêcher. Les franciscains gardiens du saint sépulcre, redoutant que cet excès de zèle irrite les Turcs, le font arrêter et conduire à Venise, d’où il regagne Barcelone. Alors il se met à l’étude, apprend le latin et fréquente successivement les universités d’Alcala et de Salamanque. Il écrit mal et d’une façon décousue, mais il prêche avec tant d’ardeur que l’inquisition, alors très ombrageuse, lui ordonne de se taire et le jette ensuite dans une prison.

Rendu à la liberté, Ignace part seul, à pied, chassant devant lui un âne chargé de ses livres et de ses cahiers. Il entre à Paris au mois de février 1528 et recommence ses études au collège de Montaigu. Là, Dieu lui fait connaître qu’il le choisit pour fonder un nouvel ordre d’apôtres. Pierre Lefèvre, François Xavier, Jacques Laynez, Alphonse Salméron, Nicolas Bobadilla et Simon Rodriguez veulent être ses disciples et partager ses travaux. L’an 1534, ils vont tous les sept, le jour de l’Assomption, dans l’église de Montmartre, entendent la messe dans la chapelle souterraine et s’engagent, par un vœu solennel, à passer en terre sainte, et, dans le cas d’impossibilité, à offrir au saint-siège leurs services.

Après un court voyage en Espagne et l’accession de trois nouveaux disciples Claude Lejay, Jean Codure et Pasquier Brouet, ils partent pour Rome, où Paul III les dissuade d’aller à Jérusalem, et les autorise à recevoir la prêtrise. Ils renouvellent leurs vœux entre les mains du nonce Veralli, se font ordonner par l’évêque d’Arba, et conviennent alors d’un genre de vie uniforme. Loger dans les hôpitaux, vivre d’aumônes, enseigner le catéchisme aux enfants, combattre l’hérésie et le dérèglement des mœurs : tel est le plan delà nouvelle société, qui prendra le nom à jamais célèbre de compagnie de Jésus.

Ignace, malgré ses objections, ses prières et ses larmes, fut élu général, et en moins de deux ans ses disciples étaient connus dans le monde entier. L’Italie, l’Espagne, le Portugal, la France, les Pays-Bas, l’Allemagne, les appelèrent à l’envi, et l’Europe dut bientôt les céder à l’Afrique, à l’Asie, à l’Amérique. Rodriguez alla en Portugal, Lefèvre en Espagne, Salméron et Brouet volèrent en Irlande, et Lejay en Allemagne, combattre l’hérésie ; Xavier s’élança vers les Indes et le Japon ; Nugnez et Gonzalez passèrent au Maroc, d’autres au Congo, en Ethiopie et dans l’Amérique méridionale. Schismatiques, païens, hérétiques, tout plia devant les nouveaux et intrépides champions de la foi. La réputation de la compagnie fut au comble lorsque ses théologiens parurent au grand concile de Trente.

Pendant que ses disciples travaillent partout à la conquête des âmes, Ignace compose avec une sagesse consommée les règles de sa chère compagnie, et trouve encore du temps pour se livrer à la conversion des pécheurs. Un volume ne suffirait pas à raconter les œuvres merveilleuses de ce saint prêtre. En vain essaya-t-il, à diverses reprises, de se décharger du généralat. Dieu seul, en l’appelant à la récompense, pouvait lui accorder le repos ; mais auparavant il lui réservait la joie de recevoir dans son institut l’illustre duc de Gandie, François de Borgia. L’œuvre du saint était accomplie : les jésuites, alors divisés en douze provinces, comptaient déjà plus de cent collèges, outre les maisons professes. Usé par les pénitences et par tant de travaux entrepris, selon sa devise, pour la plus grande gloire de Dieu, Ignace mourut à Rome, le 31 juillet 1556, à l’âge de 65 ans. Grégoire XV le mit au rang des saints (1622). Ses reliques, placées dans le tombeau de l’autel qui est en bronze doré, reposent dans une chapelle de l’église du Gésu, une des plus belles et des plus riches de Rome.

L’institut des jésuites est le plus fortement constitué des ordres religieux, celui qui a produit le plus d’hommes remarquables. « Il avait été créé pour embrasser, dans le vaste emploi de ses attributs et de ses fonctions, toutes les classes, toutes les conditions, tous les éléments qui entrent dans l’harmonie et la conservation des pouvoirs politiques et religieux. Son but était de défendre l’Église catholique contre les luthériens et les calvinistes, et son objet politique de protéger l’ordre social contre le torrent des opinions anarchiques, qui marchent toujours de front avec les innovations religieuses.Ce corps était si parfaitement constitué qu’il n’a eu ni enfance ni vieillesse. On le voit, dès les premiers jours de sa naissance, former des établissements dans tous les États catholiques, combattre avec intrépidité toutes les erreurs, fonder des missions dans le Levant et dans les déserts de l’Amérique, se montrer dans les mers de la Chine, du Japon et des Indes. » En 1880, le nombre des provinces de la compagnie de Jésus s’élevait à vingt-deux, et celui de ses membres à près de dix mille.

Réflexion pratique

Tout à la plus grande gloire de Dieu ! Cette belle et sainte maxime, qui fut le ressort de sa féconde activité, Ignace la répète 376 fois dans ses constitutions. Elle est d’ailleurs un des grands préceptes de l’Apôtre : Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, ou que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu (I Cor. X,31).

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