Le démon, en effet, convoite notre âme, et c’est le troisième signe auquel nous en pouvons connaître le prix. Quand un objet excite universellement la jalousie, que tout le monde le désire ou s’efforce de l’acquérir, c’est une preuve évidente de sa valeur.

Or, que ne fait pas le démon pour s’emparer de notre âme ? Il la tente continuellement. Il nous tente par lui-même, par les mauvais exemples, par l’attrait des plaisirs, par les passions qu’il excite en nous : il met tout en oeuvre pour nous faire tomber ; il fait sans relâche le siège de notre âme, et les soldats qu’il emploie pour y pénétrer sont l’orgueil, la vanité, la jalousie, la vengeance, l’impureté, le dégoût de la prière, le monde avec ses fausses maximes et ses voluptés mensongères. Que de mauvaises pensées il suggère, que de désirs honteux il fomente dans certains cœurs ! Repoussé, il revient à la charge et ne se décourage jamais. Il nous a attaqués tout seul et a essuyé une défaite : il attendra le moment opportun et fondra sur nous avec de nombreux renforts. Il n’épargne personne, « et les plus grands saints sont ceux qui ont été le plus tentés ».

Pourquoi tous ces efforts ? Ah ! il sait « la beauté et la valeur d’une âme, et il consentirait à souffrir deux enfers s’il le fallait, pourvu qu’à ce prix il réussît à l’entraîner avec lui. Si, après quatre mille ans de tentations, il nous gagnait, dit saint Augustin, il compterait pour rien toute sa peine. Il dit lui-même par la bouche d’un possédé, que, tant qu’il y aurait un homme sur la terre, il le tenterait, parce que, ajouta-t-il, je ne supporte pas que des chrétiens, après tant de péchés, puissent encore espérer le Ciel que j’ai perdu par une seule désobéissance ».

N’est-ce pas une honte que le démon fasse plus pour perdre notre âme que nous ne faisons pour la sauver ? Et en effet, quelle estime pratique en avons-nous ? « Quand nos animaux sont dans l’écurie, nous leur donnons à manger ; nous avons soin de fermer les portes de crainte que les voleurs ne nous les prennent ; s’ils sont malades, nous allons chercher le médecin pour les soulager ; nous sommes touchés quelquefois jusqu’au cœur en les voyant souffrir. » Le faisons-nous pour notre âme ? Avons-nous soin de la nourrir par la grâce, par la fréquentation des sacrements ? Avons-nous soin d’en bien fermer les portes, de crainte que les voleurs ne lui ravissent la grâce ? Hélas ! disons-le à notre confusion : nous la laissons périr de misère ; nous la laissons déchirer par nos ennemis, qui sont nos passions ; nous laissons toutes les portes ouvertes ; le démon de l’orgueil ou de la sensualité vient, il entre, il salit, il pourrit cette pauvre âme. « Ah ! pauvre âme, nous dit saint Augustin, que l’on t’estime peu de chose ! Un orgueilleux te vend pour une pensée d’orgueil ; un avare pour une pièce de terre ; un ivrogne pour un verre de vin ; un vindicatif pour une pensée de vengeance ! »

« Nous venons de voir combien notre âme est quelque chose de grand, combien Dieu l’aime, combien il a souffert pour la sauver, les biens qu’il lui prépare dans l’autre monde, toutes les ruses, tous les pièges que le démon lui tend afin de la perdre ! Veillons donc sur nous » de peur d’être surpris ; « prions pour connaître nos tentations », et avoir la force d’y résister ; combattons les tentations d’orgueil « en nous humiliant et en nous abaissant devant Dieu », les tentations contre la sainte vertu « en tâchant de mortifier notre corps et tous nos sens », « les tentations de dégoût dans nos prières en en faisant encore davantage et avec une attention plus soutenue ». Heureux qui aura sauvé son âme : il possédera Dieu toute l’éternité.

Extrait du livre : Ma retraite avec le Saint Curé d’Ars, par Mgr Convert. Imprimatur Août 1932

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