Que le Dieu de l’espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi, pour que vous débordiez d’espérance, par la puissance du Saint-Esprit ! (Romains 15:13)

Le don de la sagesse

Mon fils, applique-toi à la sagesse (Prov., XXVII, 11)

Le don de la sagesse est une illumination du Saint-Esprit, qui permet à notre intelligence de contempler les vérités de la foi et d’être remplie d’allégresse par suite de cette contemplation. Si le don de l’intelligence procède de la foi, la science, de l’espérance et du désir de la propre sanctification, la sagesse est le fruit de la charité. La sagesse juge tout sous l’aspect de l’amour, avec amour et par amour pour Dieu.

La sagesse conduit l’homme à sa dernière fin, en tant qu’elle le dispose à connaître Dieu, à le louer et à le glorifier sur la terre, avec l’heureuse espérance de pouvoir un jour approfondir ses infinies perfections dans l’éternité.

Considérée comme don du Saint-Esprit, la sagesse prend son origine dans la volonté, mais selon son essence, elle se trouve dans l’intelligence ; d’où il suit qu’elle n’est pas seulement spéculative, mais encore pratique (S. Th., 1, 9, 64, 1, o.). La sagesse forme le plus haut degré de la perfection sur la terre, qui se consommera un jour dans le ciel par la vision béatifique. Les dons du Saint-Esprit se concentrent dans la charité ; de manière que celui qui est rempli de charité, possède tous les dons du Saint-Esprit, pendant qu’il est impossible que celui qui en est privé puisse les avoir.

La parole latine sapientia tire son étymologie du verbe sapere (goûter) ; l’expression grecque, au contraire, signifie renommée ; parce que la sagesse est un don universellement recherché et apprécié : « Unde videtur nomen sapientiæ ibi accipi pro ejus fama, quæ a cunctis commendatur. » (S. Th., 2, 2ae, 45, 2.)

Il appartient à la sagesse, comme don du Saint-Esprit, de ne pas s’arrêter seulement à la contemplation des choses divines, mais de régler encore les actes humains et d’en bannir tous les défauts contraires à l’ordre établi par le Seigneur dans la loi naturelle et divine. Il s’en suit que la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse, puisqu’elle nous fait éviter le mal et veille à la disposition bien coordonnée de toutes nos actions ; ce qui produit la paix, qui n’est autre chose que la tranquillité de l’ordre. Saint Jacques, en affirmant que la sagesse vient d’en haut, nous prouve qu’elle est un don du Saint-Esprit et il en décrit la beauté et l’utilité.

La sagesse est en premier lieu chaste, en nous prémunissant contre la corruption du péché. Elle est amie de la paix, puisqu’elle conduit à la béatitude, effet final de la sagesse, Les paroles qui suivent indiquent les moyens les plus propres par lesquels la sagesse conduit à l’acquisition de la paix. 1° Elle vient au-devant de l’homme, qui triomphe de la corruption par le moyen de la chasteté, et veille à ce que ses actions soient nobles et dignes : elle est appelée pour cela modérée ; 2° Lorsque, par le manque de lumières personnelles, l’homme prudent recherche les conseils d’autrui, il montre une sagesse docile (suadibilis). La possession de la paix peut produire un double effet, soit que la sagesse rend l’homme susceptible de tout bien : Bonis consentiens ; soit que, mû de compassion sur les défauts du prochain, il cherche à l’en corriger. La sagesse le montre ainsi plein de miséricorde et fécond en bonnes œuvres : Plena misericordia, et fructibus bonis. Enfin, quand la sagesse nous porte à déployer un grand zèle pour le salut du prochain et qu’on s’efforce de le corriger de ses fautes non pas avec dureté, mais par amour, l’on dit qu’elle ne condamne pas avec fausseté et dissimulation, mais agit avec une franche bienveillance : Judicans sine simulatione (S. Th., 2, 2ae, 45, 6 ad 3).

Bienheureux celui qui persévère dans la sagesse ! « Les anciens Romains, écrit le Bienheureux Jean-Baptiste de la Conception, avaient construit deux temples, l’un près de l’autre, dont le premier était dédié à la Persévérance et le second à la Sagesse. Du premier l’on pénétrait dans le second. Si Salomon avait persévéré dans la sagesse, il n’aurait jamais violé son pacte avec le Très-Haut et serait demeuré fidèle à la loi sainte du Seigneur. » (Œuvres, tome III, 17 Exhort.)

« Bienheureux l’homme qui trouve la sagesse et possède une grande prudence ! » (Prov., III, 13.) La sagesse nous sera communiquée par le moyen de la prière animée d’un désir ardent de la posséder.

Quelque degré de sagesse et d’expérience que nous ayons pu acquérir, nous ne devons pas, cependant, nous laisser vaincre par le vain désir de vouloir comparaître prudents à nos yeux. Gardons-nous bien de chercher à pénétrer les secrets de Dieu avec une vaine curiosité. « Comme le miel nuit à celui qui en mange avec excès, de même celui qui veut scruter la majesté de Dieu, sera écrasé sous le poids de sa gloire. » (Prov. XXV, 27.)

Nous trouverons la plus haute sagesse dans la foi humble.
« Je vous exhorte tous, écrit l’Apôtre, selon le pouvoir que Dieu m’’a fait la grâce de me donner, en qualité d’apôtre, de ne point vous élever au delà de ce que vous devez, dans les sentiments que vous avez de vous-mêmes ; mais de vous tenir dans les bornes de la modération, selon la mesure de la foi que Dieu a départie à chacun. » (Rom., xI1, 8.)

Nous serons modérés dans notre sagesse, quand nous mettrons devant les yeux nos péchés passés ; nous mépriserons les choses présentes pour ne soupirer que vers les biens éternels. « Nous aurons trouvé la vraie sagesse, dit saint Bernard, quand faisant peu de compte des biens présents, nous aurons un pressentiment de la félicité éternelle. » (S. BERN., Serm. 15, De quærenda sapientia.)

« Donnez-moi, Ô Seigneur, cette sagesse qui préside à votre trône, et ne me rejetez pas du nombre de vos enfants : car je suis votre serviteur et le fils de votre servante » (Sap., IX, 4.)

Le don de l’intelligence

L’Esprit du Seigneur reposera sur lui, l’esprit de sagesse, de l’intelligence (IS., XI, 2)

Il y a des connaissances qui surpassent les forces de l’intelligence humaine, dont la lumière a ses bornes ; or, pour pouvoir pénétrer bien avant dans les connaissances intérieures, nous avons besoin d’une lumière surnaturelle appelée le don de l’intelligence.

Nous connaissons certaines vérités par le moyen de la foi, d’autres par le moyen de l’intelligence. Parmi les premières, il y en a qui surpassent la raison humaine, comme, par exemple, les dogmes de la Trinité et de l’Incarnation : d’autres, ensuite, sont de foi en quelque manière, comme tout ce qui est contenu dans les Saintes Écritures. Par rapport aux secondes, nous pouvons comprendre les choses d’une manière parfaite, lorsque nous les connaissons comme elles sont en elles-mêmes pendant que les choses qui concernent la foi ne peuvent être connues d’une manière parfaite. Celles qui se rapportent en quelque manière à la foi peuvent être connues parfaitement. Nous connaissons ensuite d’une manière imparfaite quand nous arrivons à connaître la vérité en tant qu’elle existe, mais non pas dans son essence. Nous arrivons à savoir que les choses qui apparaissent extérieurement ne peuvent pas être contraires à la foi.

Le don de l’intelligence a pour objet les choses qui regardent la foi et qui sont réglées pour la foi, non pas seulement au point de vue spéculatif, mais encore au point de vue pratique, puisque dans nos actions nous sommes réglés par des raisons éternelles, pour lesquelles nous avons besoin du don de l’intelligence.

Le don de l’intelligence requiert l’état de grâce. Pendant que les pécheurs sont ignorants et marchent dans les ténèbres : Nescierunt, neque intellexerunt, in tenebris ambulant (Ps. LXXXI), ceux qui suivent Jésus-Christ ne marchent pas dans les ténèbres (JOAN., VIII).

Ceux qui se trouvent en état de grâce ont la rectitude de la volonté, car l’homme opère le bien par la volonté ; mais cette volonté ne peut pas être ordonnée avec rectitude dans le bien, sans une certaine connaissance de la vérité, parce que le bien commun forme l’objet de la volonté. Or cette connaissance de la vérité est un don du Saint-Esprit. De même que le Saint-Esprit opère sur la volonté par le moyen de la charité en inspirant le bien surnaturel, il éclaire l’esprit par le don de l’intelligence pour connaître cette vérité surnaturelle vers laquelle doit tendre la volonté vraie et juste; et comme la charité se trouve en tous ceux qui sont en état de grâce, il en est de même du don de l’intelligence : « Unctio ejus docet vos de omnibus. » (I JOAN., II.)

Les dons du Saint-Esprit perfectionnent l’âme, qui est mue par le Saint-Esprit. Or le Saint-Esprit n’agit pas dans une âme, qui par le péché mortel fait obstacle à son action motrice.

La motion du Saint-Esprit consiste en ce que l’intelligence humaine connaisse la vérité en tant qu’elle conduit l’’homme vers sa fin, ce qui veut dire que non seulement il n’erre pas selon la foi, mais encore qu’il y adhère fermement comme à quelque chose d’excellent : or cela n’est possible que dans la grâce sanctifiante (S. Th., 2, 2, 8, 5, c.).

Pendant que le don de l’intelligence appartient à la faculté de connaître, la piété, la force et la crainte appartiennent à la puissance appétitive. Quant à la relation du don de l’intelligence avec la sagesse, la science et le conseil, saint Thomas est d’avis que tous ces quatre dons sont coordonnés à une connaissance surnaturelle fondée en nous par la foi : Fides autem ex auditu (Rom., X). D’où il suit qu’il y a des choses qui nous sont proposées non pas comme vues, mais comme entendues, auxquelles nous apportons notre assentiment par le moyen de la foi ; mais la foi se rapporte avant tout et principalement à la vérité première ; en second lieu à certaines considérations relativement aux objets créés et finalement elle s’étend également à la direction des actes humains, en tant qu’ils s’accomplissent par le moyen de la charité. Et c’est ainsi que deux conditions sont requises de notre part pour ce qui concerne les objets proposés à notre foi : premièrement, qu’ils soient pénétrés ou compris par l’intelligence, ce qui appartient au don de l’intelligence; il est nécessaire, en second lieu, que l’homme en ait un jugement sûr, pour y adhérer et rejeter tout ce qui s’y oppose : or ce jugement, quant aux objets divins, appartient au don de la sagesse. Quand, au contraire, ce qui est proposé par le moyen de la foi se rapporte aux choses créées cela appartient au don de la science, et finalement, lorsqu’il s’agit de l’application pratique sur ce qui convient de faire, cela appartient au don de conseil.

Nous vous demandons, ô Esprit-Saint, par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, les fruits du don de l’intelligence, la fermeté dans la foi et l’accomplissement généreux de la volonté divine.

Le don de conseil

Sur lui reposera l’esprit de conseil et de force (Is., XI, 2).

La prudence, qui consiste dans l’expression vraie et juste de la raison, trouve très utilement sa perfection dans le don du conseil dont nous sommes redevables au Saint-Esprit. Nous pouvons ainsi affirmer que ce don correspond à la prudence, en tant qu’il lui sert de secours et de perfectionnement (S. Th., 1. 2, 52, 2, c.).

Nous péchons contre la prudence par défaut de conseil, c’est-à-dire : 1° par précipitation et témérité ; 2° par manque de jugement, ou par inconsidération, et 3° par inconstance et négligence.

La parole précipitation dénote le manque de prudence et de conseil, parce qu’une personne imprudente et irréfléchie ne prends pas garde aux marches ou degrés par lesquels elle devrait descendre selon les règles ordinaires. Or ces degrés sont : la mémoire, qui se sert de l’expérience passée ; l’intelligence qui pondère les circonstances actuelles ; la prévoyance, qui jette un regard sur l’avenir ; le raisonnement, qui choisit les moyens plus opportuns pour arriver au but ; la docilité, qui suit volontiers l’avis des sages et des supérieurs. Nous pouvons comparer toutes ces dispositions aux degrés qui règlent nos actions, afin qu’’elles soient faites avec prudence (S. Th., 53, 3, C.).

L’Esprit-Saint veut que nous agissions avec réflexion : « Oculi tui videant recta, et palpebræ tuæ præcedant gressus tuos. » (Prov., IV, 25.) Lorsque, après mûre réflexion, nous sommes incertains de la résolution à prendre, nous nous adresserons avec succès au Saint-Esprit pour lui demander par une fervente prière conseil et force. « Cum ignoramus, quid agere debeamus, hoc solum habemus residui, ut oculos nostros dirigamus ad Deum. » (2 Para. XX, 12.) En un mot, il nous faut faire ce que nous pouvons et demander à Dieu ce que nous ne pouvons pas. Ce serait tenter Dieu de vouloir attendre directement le secours divin, sans rien faire de notre côté (S. Th., 1-2, 53, 4, ad 1).

L’inconstance dénote une certaine volubilité ou hésitation négligente dans la, mise en pratique d’une entreprise tout d’abord soigneusement examinée. Si la précipitation s’oppose aux sages délibérations du don de conseil, l’inconstance est un indice de manque de jugement (S. Th., 1. 2ae, 53, 5, c). Il se manifeste en ce que, sous l’inspiration du Saint-Esprit, la raison pratique juge sainement, dans les cas particuliers, et nous suggère les moyens les plus opportuns pour arriver à notre but. Pour agir avec prudence, il nous faut éviter les inconvénients suivants : 1° Éviter de se laisser guider uniquement par la prudence humaine, qui ne s’arrête qu’au temps présent et aux intérêts temporels, ce qui fait que parfois on ne recule pas devant des expédients, même injustes, pour atteindre la fin qu’on se propose ; 2° Se garder d’une confiance exagérée en ses propres lumières, en s’arrêtant exclusivement à son opinion personnelle; 3° Se prémunir contre l’agitation, le trouble, l’inquiétude, la dissipation et la précipitation, afin de pouvoir agir avec calme et sang-froid, abandonnant à un jugement équitable le soin de nous guider dans la bonne voie. L’on éviterait ainsi beaucoup de défauts de caractère et les saillies de l’impatience et tous ces écarts qui paralysent l’action bienfaisante de l’Esprit-Saint. De même que la réflexion, l’esprit de prévoyance et l’expérience sont les auxiliaires de la prudence, ce sont aussi des moyens très efficaces pour alimenter en nous le don de conseil ; 4° Nous mettre en garde contre la négligence. La perfection de la prudence, comme celle de toute autre vertu, consiste à ne pas se faire entraîner par les choses sensibles, c’est ainsi que la négligence, étant un éloignement de la fin que nous nous sommes proposés, il n’est pas étonnant qu’’elle forme un obstacle au don de conseil.

L’Esprit-Saint promet le succès dans les entreprises à ceux qui nuit et jour méditent la loi du Seigneur (Ps. CXVIII).
La dévotion au Saint-Esprit nous obtiendra, entre autres dons, celui du conseil, qui nous est si nécessaire dans la vie pratique. Nous trouverons également des conseils précieux auprès des sages et des vieillards ; car l’âge augmente l’expérience.

Ô divin Esprit, nous implorons de votre clémence, par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, siège de la Sagesse, les dons de conseil, de sagesse, de science et de force.

Veni, Creator Spiritus, 
Mentes tuorum visita,
Imple superna gratia,
Quæ tu creasti pectora.

Le don de force

Ils ont été remplis de force et de courage dans les combats (Heb., XI, 34)

La force consiste dans une disposition d’âme qui ne se laisse pas éblouir par la prospérité, ni abattre par l’adversité. La force nous est nécessaire pour accomplir fidèlement nos devoirs, combattre généreusement nos passions et supporter avec patience les peines et les souffrances de la vie.

La force atteint son apogée lorsqu’on accepte la mort avec une pleine résignation à la volonté de Dieu et avec allégresse.

Cette vertu cardinale produit les effets suivants : la grandeur d’âme, l’espérance, la sûreté, la patience et la persévérance. Quand l’âme sent croître son courage à mesure de l’augmentation des difficultés, ou, qu’à défaut de tous les moyens de secours humains, elle se confie uniquement à ‘aide tout puissante de Dieu, cette âme s’élève jusqu’à l’héroïsme : c’est ce qu’on appelle force ou grandeur d’âme, L’Église exige cette grandeur d’âme de ceux qui sont proposés à l’honneur des autels. Nous trouvons de beaux exemples de cet héroïsme en saint Jean-Baptiste, quand il reprocha à Hérode sa vie scandaleuse ; comme aussi en saint François d’Assise, quand, déshérité par son père, il se dépouilla de ses vêtements devant l’évêque en s’écriant : « Désormais je puis dire à bon droit : Notre Père qui êtes aux cieux » C’est ainsi que saint Sébastien, après avoir été guéri de ses blessures, se présenta devant Dioclétien pour lui annoncer une mort misérable et honteuse. Le bienheureux Jean-Baptiste de la Conception ne se laissa pas rebuter par les mille difficultés que lui opposèrent le démon, les méchants, les dangers sur mer et sur terre, pour empêcher qu’il restituât à l’Ordre de la Trinité sa splendeur première. L’oraison que l’Église lui a dédiée met en relief l’admirable disposition d’âme de ce grand serviteur de Dieu : Deus, qui ad majorem Sanctissimæ Trinitatis gloriam propagandam Beatum Joannem Baptisiam Confjessorem tuum admirabilà spiritus fortitudine, et invicla patientia roborasti, etc. C’est une marque de grandeur d’âme lorsqu’on défend l’honneur de la foi au milieu d’une majorité de contradicteurs.

Ils étaient certainement animés du Saint-Esprit, ces généreux martyrs, qui, à l’exemple de saint Laurent, parlèrent avec force et éloquence devant leurs juges et subirent le martyre le plus cruel non seulement avec une patience inaltérable, mais encore avec joie. Le Seigneur avait dit en effet : « Quand vous serez mis entre leurs mains, ne vous mettez pas en peine de ce que vous aurez à dire, parce qu’il vous sera suggéré ce que vous aurez à répondre, car ce ne sera pas vous qui parlerez, mais l’Esprit de votre Père parlera en vous. » (Matth., X, 19-21.)

L’espérance est l’intime persuasion qu’une œuvre entreprise pour la gloire de Dieu ne manquera pas de réussir.
Cette espérance s’allie avec une joie intérieure et un élan généreux dans l’accomplissement de l’œuvre commencée.
« Jésus-Christ, dit sainte Sophie Barat, ne guide ses fidèles Épouses au Calvaire, que pour les soulever ensuite au sein du Père céleste. Voulez-vous que le Seigneur soit content de vous et qu’en vous il trouve ses délices ? Patience, allégresse, confiance, toujours confiance dans la joie. » De même que la divine Providence se sert d’un goût sensible pour nous porter à l’action, de même l’élan de l’âme dans son entreprise, est un gage de succès et de force au milieu des difficultés qui peuvent surgir. C’est en ce sens que l’Apôtre nous invite à fixer les yeux sur Jésus, comme sur l’auteur et le consommateur de la foi, qui, en vue de la joie éternelle qui lui était proposée, au lieu de la vie tranquille et heureuse dont il pouvait jouir, à souffert la croix, en méprisant la honte et l’ignominie attachée à ce supplice ; et qui, pour récompense de ses travaux et de ses humiliations passées, est maintenant assis à la droite du trône de Dieu (Heb., XIII, 2). Les Apôtres sortirent avec allégresse des tribunaux, où ils avaient été flagellés, parce qu’ils avaient été jugés dignes de souffrir pour le nom de Jésus.

La sûreté s’appuie sur le secours d’En-haut et est fondée sur l’espérance. Cette sûreté que nous pouvons admirer dans les Psaumes de David, doit remplir de courage les sectateurs fidèles de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui nous exhorte à la confiance par ces paroles : « Ayez confiance : j’ai vaincu le monde. » « Ne vous mettez pas en peine ni de ce qui doit alimenter votre vie, ni de ce dont vous devez vêtir votre corps. La vie n’est-elle pas plus que l’aliment, et le corps plus que le vêtement ? » (Matth., VI, 25.)

La patience consiste dans la tranquillité de l’âme au milieu des sollicitudes et des épreuves de la vie. Aucune entreprise ne pourra être couronnée de succès sans la patience. Dans son Epître catholique, saint Jacques nous y exhorte par ces paroles : « Mes frères, vous qui avez embrassé la foi de Jésus-Christ, et qui êtes maintenant exposés à la fureur des ennemis de son nom, considérez, comme le sujet d’une extrême joie, les diverses afflictions qui vous arrivent, sachant que l’épreuve de votre foi produit la patience. Or la patience doit être parfaite dans ses œuvres : elle doit être accompagnée de fermeté, de persévérance, de charité, et de toutes les autres vertus chrétiennes : ayez donc soin que cela soit ainsi chez vous, afin que vous soyez parfaits et accomplis en toute manière et qu’il ne vous manque rien de tout ce qui est nécessaire pour arriver à la gloire qui doit en être la récompense. » (Jac., I, 2-5.)

Ô divin Esprit, remplissez nos cœurs du saint amour, afin qu’en nous rappelant toutes les contradictions que Jésus-Christ Notre-Seigneur a souffertes de la part des pécheurs, qui se sont élevés contre lui, nous ne nous découragions pas, et que nous ne tombions pas dans l’abattement, à cause des maux que nous avons à souffrir, et qui ne sont rien en comparaison de ses ineffables souffrances.

Le don de la science

Qui aime la discipline, aime la science (Prov., XII, 1)

Le don de la science est une lumière surnaturelle de l’Esprit-Saint qui nous dévoile la doctrine de la foi et nous convainc de la vérité des choses que nous devons croire par des motifs puisés dans les choses créées. Par le moyen de ce don, les prêtres sont illuminés de manière à pouvoir instruire les peuples sur les mystères de la foi et sur leurs devoirs moraux. Par le don de la science, le Seigneur éclaire les prédicateurs afin qu’ils puissent annoncer la parole divine, en sorte qu’elle instruise, plaise, touche et convainque. Fortifiés par le secours du Saint-Esprit, ils savent choisir les moyens les plus opportuns pour diriger les fidèles dans la voie de la vertu et du salut éternel.

Le don de la science est également un grand trésor pour les fidèles, car le Saint-Esprit éclaire leur intelligence pour comprendre les vérités révélées et pour s’approprier les instructions des prêtres. « La foi vient de ce qu’on a entendu ; et on a entendu parce que la parole de Jésus-Christ a été prêchée. » (Rom., x, 1′.)

Si les païens évangélisés par les Apôtres embrassèrent avec tant de zèle et d’amour les sublimes et difficiles enseignements de la foi chrétienne et y conformèrent leur vie, nous devons l’attribuer au don de la science, qui leur fut prodigué par le Saint-Esprit. Ce don s’appuie tout principalement sur la foi et ensuite sur l’application de la foi à la vie pratique, en tant que la raison est éclairée sur ce qui concerne les vérités éternelles et les mœurs. La raison n’’embrasse pas seulement ces vérités comme elles sont en elles-mêmes, mais encore comme la règle d’une conduite équitable (S. Th., 1, 2, q. 58, 4; 2. 2, q. 3).

Nous sommes tenus à acquérir les connaissances nécessaires des préceptes communs du droit et des devoirs de notre charge (S. Th., 1, 2. 76, 2, c.). La science de la loi divine est inséparable du ministère sacerdotal. Trois obstacles empêchent l’acquisition de la science : l’indisposition intérieure, l’occupation excessive et la paresse. Au contraire, la méditation, le recueillement, l’activité surnaturelle, les vertus morales, en particulier la chasteté, sont d’un puissant secours pour l’acquisition de la science. Le prophète Daniel dit, en effet, que le Seigneur donna la science et la discipline dans la sagesse aux trois jeunes gens qui s’étaient conservés purs et chastes durant la captivité de Babylone : « Pueris his dedit Deus scientiam et disciplinam in omni libro, et sapientia. » (Dan. I.)

Par son application à la vie contemplative, la vénérable Angèle-Marie de la Conception, fondatrice du monastère de la Très-Sainte-Trinité à Toboso en Espagne, avait été favorisée du Saint-Esprit de la science des Saintes-Écritures et de la doctrine des Saints Pères, au point qu’elle mériterait à bon droit le titre de docteur dans la Théologie mystique.

Le don de la science se révèle admirablement dans les œuvres des Saints Pères. Quand le Seigneur dit à saint Thomas d’Aquin qu’il avait bien écrit sur le Sacrement de son Corps sacré, il loua en même temps dans le Docteur angélique et le don qui lui avait été conféré par le Saint-Esprit et la coopération à ce don si précieux. C’est surtout dans l’office du Très Saint Sacrement que ce saint Docteur est devenu, sous l’inspiration du Saint-Esprit, le chantre classique de la Sainte Eucharistie. Il a su choisir avec un goût délicat les textes de la Sainte Écriture et surtout des Psaumes de David, comme aussi les sentences des Saints Pères pour en former une magnifique guirlande enlacée d’antiennes très pieuses en l’honneur du Très Saint Sacrement.

C’est aussi par une grâce toute spéciale du Saint-Esprit que plusieurs saints ont pu acquérir la science, non pas par leur industrie personnelle, mais d’une manière toute miraculeuse, comme les Apôtres après la descente du Saint-Esprit.
Le Seigneur peut produire les effets des causes secondes sans elles ; et de même qu’il peut conférer la santé sans le secours des remèdes naturels, il peut aussi accorder une science infuse, sans le secours d’un étude approfondie (S. Th, 1. 2, 51, 4, c.).

En parlant des dons variés dont la bienheureuse Anna-Maria Taïgi fut favorisée de Dieu, Mgr Natali atteste : « La Servante de Dieu eut un don tout particulier, celui d’une lumière mystérieuse qu’elle voyait, en guise d’un soleil ; et, de même que nous voyons, en vertu des rayons de notre soleil, les objets naturels de la terre, ainsi elle apercevait tous les événements les plus variés dans la lumière mystérieuse de ce soleil, qu’elle eut constamment sous les yeux durant quarante-sept ans. Elle fut favorisée la première fois de cette extraordinaire apparition pendant qu’elle se donnait la discipline dans sa chambre : elle la vit tout d’abord dans une lumière faible et voilée; et au fur et à mesure qu’elle avançait dans la perfection, ce soleil devenait de plus en plus resplendissant, jusqu’à atteindre l’éclat de sept soleils réunis ensemble.
Aux bords des rayons supérieurs de ce soleil l’on apercevait une large couronne enlacée d’épines qui s’étendaient sur toute la surface : deux longues épines, en guise de deux verges, se croisaient de part et d’autre sous le disque lumineux : leurs pointes recourbées sortaient des deux faisceaux de lumière du soleil. Dans le centre très resplendissant se voyait à droite une très belle figure aux vêtements éblouissants, les regards élevés vers le ciel dans l’attitude de l’extase et de la contemplation : deux rayons de lumière sortaient verticalement de son front, selon la manière dont on représente ordinairement Moïse : ses pieds touchaient l’extrémité inférieure du disque solaire. Le centre était réfractaire à n’importe quelle ombre ou image qui s’élevait vers lui du fond de la terre; et lorsque ces objets s’en approchaient, ils en étaient refoulés impétueusement comme mus par un ressort invisible !
La bienheureuse apercevait dans ce soleil les événements naturels et surnaturels de ce monde et pouvait plonger ses regards soit aux extrémités de la terre, soit aux profondeurs des cieux; elle apercevait des faits bien qu’éloignés et se rendait compte des secrets les plus cachés; elle entrevoyait les physionomies de personnes qu’elle n’avait jamais vues et lisait les pensées les plus occultes des personnes éloignées ou présentes et en connaissaient l’état de conscience, les souffrances et les peines. Elle percevait tout cela avec la rapidité de l’éclair par un regard jeté furtivement sur le disque solaire. Pour ces raisons, le cardinal Pedicini était d’avis que ce soleil n’était pas seulement un signe allégorique, mais un indice de l’opération divine.
» (Mgr Salotti, La Beata A. M. Taïgi seconda la critica e la storia.)

Le don de piété

La piété est utile à tout (I Tim., IV, 8)

La Sainte Église, notre Mère, nous enseigne que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils ; qu’il habite en nous par la grâce sanctifiante et élargit ses sept dons aux âmes bien disposées. Après avoir examiné les premiers cinq dons, nous allons considérer l’excellence du don de piété et ses marques caractéristiques.

Le don de piété est une conséquence de la sainte crainte de Dieu, dont nous parlerons en dernier lieu, en tant que nous implorons le secours divin par le moyen de la prière.

Le don de piété consiste : 1° dans la disposition où nous sommes de considérer Dieu comme notre Père, de converser avec lui avec une affection filiale, de chercher à nous mettre en communication avec lui par la prière, d’observer ses commandements avec une crainte filiale basée sur l’amour, et de nous soumettre pleinement aux dispositions de sa divine Providence. 2° Il se manifeste dans l’amour et la dévotion aux Saints, en tant que nous les vénérons comme nos frères et nos sœurs dans la splendeur de la gloire. 3° Ce don consiste à témoigner une vénération et un amour filial à l’Église, parce qu’elle représente Dieu à notre égard et qu’elle est notre Mère spirituelle. 4° Ce don se manifeste dans le respect pour tout ce qui a rapport à notre sainte religion, au culte divin et aux cérémonies liturgiques. 5° Il se montre aussi dans l’accomplissement de nos devoirs envers le prochain, dans lequel nous envisageons les enfants de Dieu et nos frères en Jésus-Christ. 6° II se révèle finalement dans un grand esprit de douceur, de bonté, de pitié, de bienveillance, de paix et d’onction spirituelle qui prend sa source dans le saint amour.

Parmi les signes caractéristiques de la piété nous pouvons énumérer : 1° un grand amour pour Dieu ; 2° une sincère charité pour le prochain ; 3° une soumission entière à la volonté divine.

Un grand amour pour Dieu. Puisque nous devons aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme et de toutes nos forces, et notre prochain comme nous-mêmes, nous devons veiller à ce que l’amour qui est dû au Seigneur l’emporte sur celui que nous devons au prochain : car il n’est pas permis de partager notre cœur entre Dieu et les créatures ; il doit lui appartenir d’une manière absolue et sans réserve. Nous devons, par conséquent, mettre notre bonheur à penser à Dieu, à converser avec lui dans la prière et à nous soumettre en toutes choses aux dispositions admirables de sa Providence.

Cet amour pour Dieu il nous faut le manifester par l’esprit de sacrifice avec la disposition de nous consacrer, si la gloire de Dieu nous le demande, aux actions les plus héroïques.

« Le véritable amour, dit saint François de Sales, ne peut souffrir aucune rivalité ; il demande à régner souverainement dans le cœur ; et quand il cesse d’y régner, il cesse d’être avec nous. »

Le bienheureux Simon de Roxas dit aussi : « Nous devons aimer Dieu avec un amour filial en préférant sa gloire à notre propre intérêt. »

Une sincère charité envers le prochain. La vraie charité n’est ni jalouse, ni ambitieuse, ni vaine. La piété sincère préfère renoncer à ses commodités, plutôt que de manquer le moins du monde à la charité ; elle est disposée soit à prendre part à la paix contemplative de Marie-Madeleine, soit à partager l’activité avec sainte Marthe (Guerrici, Ab., In Ass. B. M. V.). De même que l’huile a la propriété de soulager les diverses infirmités, la piété a elle aussi le secret d’adoucir les peines et les sollicitudes du prochain, car la pratique des œuvres de miséricorde découle principalement d’une piété sincère, selon les paroles de saint Jacques : « La religion et la piété pure et sans tache aux yeux de notre Père consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leur affliction, et à se conserver pur de la corruption du siècle présent. » (Jac., I, 27.) La vraie piété se manifeste par une charité sincère, une patience à toute épreuve et une obéissance victorieuse. Toute autre chose serait une hypocrisie pharisaïque. Il nous faut donc orner nos cœurs avec la piété véritable, qui a ses racines dans l’amour envers Dieu et envers le prochain. Un jour que la vénérable Angèle-Marie de la Conception priait pour que la charité et l’union fraternelle régnassent entre les membres de l’Ordre de la Très-Sainte-Trinité, saint Jean de Matha lui apparut et l’’inonda de célestes consolations (Summn. n° 220, p. 875). Le vénérable P. François des Anges, religieux Trinitaire, avait pris la résolution suivante : « Je ne me contenterai pas de prier pour le prochain ; mais je ferai tout mon possible pour lui venir en aide par mes paroles et par mes actions en tout ce qui a rapport à son salut éternel et à sa perfection. »

Une entière soumission à la volonté de Dieu. C’est là une marque évidente de la vraie piété, selon l’exemple de notre divin Rédempteur durant sa vie apostolique, son agonie dans le Jardin des Oliviers et sa mort en croix. « Nous pouvons classer parmi ceux qui peuvent être appelés doux et humbles de cœur, nous dit saint Augustin, ceux qui, en toutes leurs bonnes œuvres, recherchent uniquement le bon plaisir de Dieu; et qui, au milieu des contrariétés, ne cessent d’aimer Dieu : « In omnibus quæ mala patiuntur, non displicet Deus. » (S. Aug., Serm. 80.) « Écoute bien, dit ce saint Docteur, ô toi qui prétends être rempli de douceur, et veux être préservé aux jours mauvais ; écoute, Ô toi, qui aimes la loi divine, écoute bien, Ô toi qui prétends être doux et humble de cœur, ne te scandalise pas, aie une grande paix dans ton cœur, pour pouvoir posséder la terre et trouver tes délices dans la multitude de la paix. Cherche en toute chose de ne jamais te plaire à toi-même. Quidquid bont facis, non tibi placeas. » « Efforce-toi, écrit saint Michel-des-Saints, de pratiquer une entière soumission à la volonté de Dieu et de conserver une grande paix intérieure unie à une grande patience au milieu des contrariétés et des adversités que tu peux avoir à souffrir, soit de la part de Dieu, soit de la part des hommes, Considère toutes les souffrances et les épreuves de la vie comme des dons du Père des miséricordes. » Deux lettres du même saint commencent par ces paroles : « Que la Très Sainte Trinité demeure dans vos cœurs et vous conserve en sa sainte grâce, afin que vous cherchiez à accomplir en tout la très sainte volonté du Seigneur ! »

Par le moyen de cette uniformité de notre volonté avec la volonté divine, nous serons toujours disposés à témoigner un grand amour à Dieu et un véritable esprit de piété et de résignation selon les paroles du divin Maître : « Afin que le monde sache que j’aime le Père et que j’agis comme le Père m’a ordonné, levons-nous. » (Joan., XIV, 31.)

Le don de la crainte de Dieu

La crainte de Dieu est le commencement de la sagesse (Eccli, 1, 16).

Pour mieux connaître en quoi consiste la crainte, un des sept dons du Saint-Esprit, il est nécessaire d’en examiner les différentes espèces. Quand nous abandonnons Dieu par crainte des maux qui nous menacent, c’est là une crainte humaine ou servile, que le Seigneur nous défend par ces paroles : « Ne craignez pas ceux qui tuent le corps. » (Matth., X, 28.) Quand, au contraire, nous nous approchons de Dieu, par suite des maux qui nous menacent, cela peut arriver pour deux raisons. Si nous nous tournons vers Dieu et lui demeurons fidèles par crainte des châtiments et des afflictions, nous avons une crainte servile. Or la crainte servile n’est pas un mal, puisqu’elle vient du Saint-Esprit selon les paroles de l’Apôtre : « Non accepistis spiritum servitutis. » Vous n’avez pas reçu l’esprit de servitude, pour craindre de nouveau, mais vous avez reçu l’esprit d’adoption comme ses enfants, par lequel nous crions : Abba, Père. » (Rom., VIII, 15.) Il y à un esprit qui produit deux craintes : la crainte servile et la crainte chaste ( Glossa ord. l. Aug. Tract. q. in Ep. S. Joann.).

Quand, au contraire, l’âme se tourne vers Dieu et lui demeure fidèle par crainte de l’offenser, elle sera animée d’une crainte filiale, parce que les enfants bien nés se gardent bien d’offenser leur père.

L’expression commencement de la sagesse peut s’expliquer de deux manières, selon son essence et selon ses effets.
Considérée comme une disposition de notre vie selon les raisons divines, la sagesse consiste dans son essence dans les premiers principes de la révélation, c’est-à-dire dans les articles de la foi. Considérée dans ses effets, nous appelons commencement de la sagesse la source de son opération, selon qu’elle est servile ou filiale. La crainte servile est comme un principe extérieur qui dispose à la sagesse, en tant qu’elle fuit le péché par crainte du châtiment et est ainsi une disposition pour l’effet de la sagesse, selon les paroles de l’Ecclésiastique : « Timor Domini eæpellit peccatum. » (Eccli, L.) La crainte filiale ou chaste est le commencement de la sagesse, comme premier effet de la sagesse. Comme c’est le propre de la sagesse de régler la vie humaine selon les raisons divines, nous devons prendre comme commencement de la sagesse la crainte de Dieu qui doit toujours accompagner l’adoration divine, la soumission entière à la très sainte volonté de Dieu dont nous ne devons cesser de dépendre en toute circonstance.

Pendant que la volonté de pécher peut être unie à la crainte servile, la crainte filiale au contraire, ne peut subsister sans la charité : d’où il suit que seulement la crainte filiale ou chaste est un des sept dons du Saint-Esprit.
Car ces dons étant certaines perfections habituelles des facultés de l’âme, il doivent nécessairement être sous l’empire du Saint-Esprit. Or l’Esprit-Saint opère uniquement dans les âmes par le moyen de la grâce sanctifiante ; et ne souffre pas qu’on oppose des obstacles à ses opérations : car, par le péché mortel, l’action du Saint-Esprit serait empêchée par la répugnance du mobile au mouvant. « Eæ repugnantia mobilis ad movens impeditur movens. » La crainte filiale n’oppose aucune résistance à l’Esprit-Saint.

Dans l’énumération des sept dons du Saint-Esprit, la crainte filiale occupe le premier rang en montant et le dernier en descendant (S. Aug., Lib. de Serm. Dom. in monte, cap. 4).

Cette crainte filiale croît en proportion de la charité comme l’effet croît en raison directe de la cause. Plus on aime Dieu, plus on craint de l’offenser et de se séparer de lui. La crainte servile, au contraire, diminue à mesure que la charité augmente ; car plus on aime Dieu, moins on craint la punition ; et l’on n’y pense même pas, quand cet amour pour le Souverain Dieu est si grand, qu’on s’oublie soi-même. Par l’union avec Dieu, on espère une récompense beaucoup plus ample et l’on craint moins le châtiment.

La crainte filiale accompagnera, en quelque sorte, les élus dans l’éternelle Patrie. Cette crainte chaste, dont l’effet dure éternellement, n’est pas une crainte qui terrifie ; mais qui nous retient dans le bien et nous fortifie dans la pratique des vertus, avec la douce espérance de ne jamais perdre la grâce et l’amitié de Dieu. Quand finalement sonnera pour nous l’heure fortunée où nous serons parvenus à notre fin suprême et nous aurons compris la béatitude éternelle et immuable, la crainte des maux ne pourra plus troubler notre bonheur.

Par crainte chaste ou filiale, nous entendons cette puissance et cette onction du Saint-Esprit qui agissent avec force et suavité sur notre volonté, de manière que nous craignons d’offenser Dieu. Nous arrivons ainsi à goûter cette tranquillité de la paix, qui est le fruit de la grâce sanctifiante. C’est au ciel que l’âme fidèle arrivera à goûter les suaves effets de cette crainte sainte et filiale : « Ita fortasse timor in sœculumn sœculi dictus est permanens, quo timor, ipse perducit. » (S. Aug., De Civit. Dei, XIV, cap. 9.). Le Pape saint Grégoire explique de la manière suivante les paroles de Job : « Les colonnes du ciel tremblent, et s’épouvantent en sa présence » Columnæ cælà contremiseunt ; et pavent ad nutum ejus » (Job, XXVII) : Les puissances mêmes du ciel, qui ne cessent de fixer leur esprit sur le Seigneur, tremblent en cette contemplation ; mais cet effroi n’est accompagné d’aucune peine : ce n’est pas là le frémissement de la crainte, mais celui de l’admiration : « lpsæ virtutes cælorum, quæ hunc sine cessatione conspiciunt, in ipsa contemplatione contremiscunt ; sed idem tremor, ne eis pœnalts sit, non timoris est, sed admirationis. » (S. Greg., Lib. 17, Moral.)

Nous vous supplions, ô Esprit-Saint, par l’intercession de la glorieuse Vierge Marie, de nous accorder une crainte filiale et chaste, pour demeurer fidèles dans le service de Dieu, jusqu’à nos moindres obligations.

La dévotion au Saint-Esprit, Dons et Fruits du Saint-Esprit de R. P. François-Xavier De l’Immaculée-Conception

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