Entrons rapidement en matière ; et d’abord, par qui ce monde, par qui le globe de cette terre et son atmosphère sont -ils donc habités ?

Facile réponse. Les habitants de ce monde, ce sont des animaux et des esprits …. Et pour parler un langage assez peu philosophique, mais parfaitement intelligible, j’ajouterai : Ce sont des esprits logés dans des corps, ou bien, attachés à certains lieux (c’est la Mundane force de la nouvelle école), ou bien encore, vaguant dans l’espace et libres ou non de tout lien avec la matière. Mais n’est-ce point effaroucher son monde que de tenir un tel discours ?

Un peu moins, je me le figure, que si j’eusse osé me le permettre dix mois plus tôt, mais beaucoup encore. – Comment, me dira-t-on, vous croyez donc d’une foi bien ferme à ces prétendus Esprits, à ces intelligences actives et puissantes qui pénètrent tous les éléments de la nature, qui savent posséder les instruments de l’âme, c’est-à-dire les corps, et qui parlent à l’âme elle-même ?

Oui, certes, j’y crois, et d’abord parce que l’Église m’enseigne leur existence. Elle me la révèle et me l’explique dans sa science profonde. Cette science prend sa source dans la parole de Dieu ; elle se grossit, en traversant les siècles, de l’observation de faits appuyés sur les témoignages les plus solides, et se fortifie des inductions que le raisonnement en dégage.

J’y crois, parce que l’étude et la philosophie ont lentement jeté les bases de ma croyance.

J’y crois enfin, parce que je suis redevable à mes propres sens et aux sens des hommes les plus dignes de foi de mon intimité, de témoignages que je ne puis rejeter sans renier les lois de la certitude, c’est-à-dire le terrain même où la raison construit et élève ses édifices ! Quoi de plus ?

Les paroles très positives de l’Église démontrent à quel point cette foi chez elle est vive, est nette et fondamentale.

On composerait d’effrayantes légions du nombre de ces chrétiens, éclairés d’ailleurs par le flambeau des sciences profanes, mais que le cours de leurs études a laissés étrangers à la connaissance des saintes Écritures, et chez lesquels l’attentive lecture du texte divin causerait, en ces matières, une complète révolution d’idées. Bien plus, j’ai souvent observé que la plupart d’entre eux se figureraient pécher contre la raison, et presque contre l’Église elle-même, s’ils prenaient à la lettre celles de ces vérités que la parole écrite sous l’inspiration du Saint-Esprit y formule de la façon la plus littérale.

C’est donc à ces chrétiens, de préférence, que mes paroles diront la nature, la violence et les ruses de l’ennemi contre lequel Dieu veut que nous combattions en corps d’armée ; car, ôtez les Portes et les Puissances de l’enfer, qui ne prévaudront point contre l’héritage du Christ, mais qui ne se lasseront jamais de lui faire une guerre cruelle ; ôtez ces implacables ennemis de notre salut, et déjà nous avons peine à comprendre l’armée des fidèles, ou l’Église elle-même, avec ses noms de militante et de triomphante. Déjà nous ne comprenons plus ni le sacrement qui nous introduit dans son sein en chassant de nos personnes le démon, ni ses sources de grâces, ni ses prières , ni ses exercices, ni ses exorcismes, ni ses armes de combat. Oui, si les démons ne sont point, en réalité, les chasseurs et les tueurs d’âmes qu’elle nous dépeint, son histoire n’est plus qu’un tissu de contes puérils ; elle répond à l’idée qu’aiment à s’en former ceux qui ne trouvent de charme à l’étudier que dans parole de ses ennemis.

Ouvrons, ouvrons le livre de l’Église et lisons y sa croyance : Il y eut un grand combat dans le ciel ; Michel et ses anges combattaient contre le dragon , et le dragon avec ses anges combattaient contre lui . Mais ceux-ci furent les plus faibles. Et ce grand dragon, cet ancien serpent qui est appelé le diable et Satan, et qui séduit tout le monde, fut précipité. Il fut précipité en terre et ses anges avec lui (Saint Jean , Apocal. , ch, XII , v . 7. Voir l’explication de ce combat dans Ant. Rusca, théologal de Milan, De inferno et statu Dæmonum ante mundi exitium). Et j’ai vu Satan tomber du ciel comme un éclair (Dit le Christ , saint Luc, ch X.).

Voilà donc la première patrie des Anges déchus : le ciel ! Et les disciples du Christ se réjouissent, en disant à leur divin maître : Les démons mêmes nous sont assujettis par la vertu de votre nom. ( Id .) — Éclairés par celui qui s’appelle la lumière et la vie, les disciples ont reçu le don de voir cet invisible ennemi .

Écoutez – les crier aux fidèles : Revêtez-vous des armures que Dieu vous donne, afin de pouvoir résister aux embûches et aux artifices du démon ; car nous avons à combattre non pas contre des hommes de chair et de sang , mais contre les principautés et les puissances infernales, contre les princes de ce monde de ténèbres, contre les Esprits de malice répandus dans l’air. (Saint Paul, Éphés., chap . VI . )

Soyez sobres et veillez ; car le démon, votre ennemi, tourne autour de vous comme un lion rugissant, cherchant quel est celui qu’il pourra dévorer (Saint Pierre , ch. v, Épit. 1 , v. 8. Méditez ces paroles du psaume 90 : Liberavit me de laqueo venantium et a verbo aspero… non timebis a limore nocturno…. a sagitta volante in die , ab incursu et dæmonio meridiano. ).

J’appréhende qu’ainsi que le serpent séduisit Ève par ses artifices, vos esprits aussi ne se corrompent et ne dégénèrent de la simplicité chrétienne. (2º aux Corint. , saint Paul, chap. XI , V. 3, 13, 14)… Des ouvriers trompeurs se transforment en apôtres de Jésus-Christ, et l’on ne doit point s’en étonner, puisque Satan même se transforme en ange de lumière .…

Les démons ont donc habité le ciel ; ils habitent donc l’air et la terre ! Ouvrons les yeux pour voir s’ils n’habitent point aussi le corps des hommes et celui des animaux ; si l’enfer n’est point peuplé par des démons, qui tantôt y séjournent et tantôt obtiennent la liberté de s’en échapper. Rien de moins métaphorique que les simples paroles de l’Évangile, qu’il me suffit, pour le moment, d’alléguer en réponse à ma formule interrogatoire.

Un jour, Jésus et les disciples abordèrent au pays des Géraséniens , sur le bord opposé à la Galilée. Et lorsque Jésus fut mis à terre, il vint au-devant de lui un homme qui, depuis longtemps, était possédé du démon, qui ne portait point d’habits, et qui ne demeurait point dans des maisons ; cet homme séjournait dans des sépulcres et sur les montagnes, criant et se meurtrissant lui-même avec des pierres.

Se prosternant, il lui dit à haute voix : Jésus, fils du Dieu très-haut, qu’y a-t-il de commun entre vous et moi ? Je vous conjure de ne point me tourmenter ; êtes-vous venu pour nous tourmenter avant le temps ? Car Jésus commandait à l’esprit impur de sortir de cet homme, parce qu’il l’agitait depuis longtemps ; en sorte que, quoiqu’on le gardât lié de chaînes et les fers aux pieds, il rompait tous ses liens, et était poussé par le démon dans les déserts. Quels récits sont plus justement populaires, moins étudiés pourtant, et moins compris ?

Jésus dit à l’Esprit : Quel est ton nom ? Et il lui répondit : Je me nomme Légion , — parce que plusieurs démons étaient entrés dans cet homme.

Et ces démons le supplièrent qu’il ne leur commandât point de s’en aller dans l’abîme. Un troupeau de pourceaux se trouvant à proximité, ils le prièrent de leur permettre d’y entrer, ce qu’il leur accorda. Les démons étant sortis de cet homme entrèrent dans les pourceaux ; et tout le troupeau, qui était d’environ deux mille, courut avec impétuosité se précipiter dans la mer, où ils furent tous noyés (SaintMatthieu , ch . VIII ; saint Marc, ch . V ; saint Luc, ch. VII ; – lire Psellus, de Dæmonibus , cap. sex Dæmonum ….).

Nous remarquerons, chemin faisant, cette puissance surnaturelle du démoniaque qui, parce qu’elle agit indépendamment de l’homme, lui permet de rompre, comme un fil, tous les liens de fer contre lesquels sa chair eût dû se meurtrir, contre lesquels ses os eussent dû se briser, s’il n’y eût eu contre le métal d’autre action que celle de la force humaine.

Cependant, ces puissances spirituelles ne jouissent point toujours de la liberté redoutable de se livrer, au milieu de nous, à leur passion pour le mal. « Ces anges qui ont péché, Dieu les a précipités dans l’abîme, où les ténèbres leur servent de chaînes, pour être tourmentés et le nus comme en réserve jusqu’au jour du jugement. » ( Saint Pierre, épit. 2, ch. 11. ) Mais aussi la colère, disons la justice de Dieu, ouvre par intervalles les portes de cette prison, où paraissent être retenus et comprimés les plus coupables et les plus redoutables de ces Esprits (Lire ou parcourir Ant. Rusca , théologal de Milan , savant très-estimé ; De statu Dæmonum ante mundi exitium .) !

Le puits de l’abîme est ouvert ; il s’en élève une fumée dont l’air et le soleil sont obscurcis ; il en sort une multitude de sauterelles, semblables à des chevaux préparés pour le combat. Leurs têtes portent des couronnes d’or, leurs visages ressemblent à des visages d’hommes, leurs cheveux sont comme des cheveux de femmes, et elles ont des dents de lion .

Abbadon, l’exterminateur, l’ange de l’abîme, est leur roi … (Apocal., ch. Ix .)

Mes deux témoins prophétiseront, dit le Seigneur : « Mais après qu’ils auront achevé de rendre témoignage, la bête qui monte de l’abîme leur fera la guerre, les vaincra et les tuera… » (Apocal. , ch. XI. )

L’ange du ciel qui a la clé de l’abîme, prit le dragon, l’ancien serpent qui est le diable et Satan, et l’enchaîna pour mille ans. Et l’ayant jeté dans l’abîme, il le ferma sur lui et le scella, afin qu’il ne séduisît plus les nations jusqu’à ce que mille ans fussent accomplis ; après quoi, il doit être délié pour un peu de temps.

Après que les mille ans seront accomplis, Satan sera délié, et il sortira de sa prison ; et il séduira les nations qui sont aux quatre coins du monde . (Apocal. , ch . xx.)

Les textes que nous avons cités nous permettront, un peu plus tard, de rapporter des faits analogues, appuyés sur des autorités fort graves dans l’Église catholique. Et, si ces faits prodigieux ne puisent point dans les Écritures saintes la preuve de leur existence, au moins ont-ils ce livre pour garant de leur possibilité.

Extrait de l’ouvrage : Mœurs et pratiques des démons ou des esprits visiteurs, par Le Chevalier Gougenot des Mousseaux, 1854)

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