L'occultisme autrefois et aujourd'hui - partie 2

L’occultisme autrefois et aujourd’hui – partie 2

Par Louis Dasté, licencié ès sciences, ingénieur.
Juillet 1898.

Sans nous attarder à définir les liens étroits unissant entre eux les divers Mystères des Temples de l’Antiquité, nous recueillons simplement les traditions les plus précises sur l’Initiation égyptienne, pour commencer. Aussi bien, nos lecteurs verront de suite combien profonde a été l’action des Hiérophantes d’Égypte, puisque tous les autres Mystères semblent dériver très directement de ceux d’Isis et d’Osiris.

Religions et Initiations antiques

I – Les Mystères

Jamblique de Chalcis en Cœlé-Svrie, qui vivait dans la première moitié du quatrième siècle de notre ère, nous a laissé un Traité des Mystères égyptiens, dans lequel sont relatées les principales scènes des épreuves de l’Initiation.

Le Sphinx de Gizeh, dit l’auteur du Traité des Mystères, servait d’entrée aux souterrains sacrés dans lesquels étaient subies les épreuves du Magisme.  “Cette entrée se dessine encore entre les jambes antérieures du colosse accroupi.” (Histoire de la Magie, par Christian, ancien Bibliothécaire au Ministère de l’Instruction publique et des Cultes)

Suit une longue et vivante description des épreuves isiaques. Elles ont été manifestement copiées — et simplifiées — dans les Initiations maçonniques d’aujourd’hui. Les auteurs Francs-Maçons les plus éminents le font d’ailleurs ressortir de la plus évidente façon.

À la page 132, nous trouvons une épreuve du feu admirablement machinée; p.133, une épreuve par l’eau qui ne fait pas moins honneur à l’imagination des favoris d’Isis !

Après des exercices variés exécutés dans les souterrains qui sillonnaient la plaine de Gizeh, le futur Initié parvenait à une crypte, creusée au cœur de la Grande Pyramide, et où le collège des Prêtres l’attendait, rangé devant la statue colossale d’Isis. Là se plaçait l’épreuve du poison, rajeunie aujourd’hui comme l’on sait dans l’épreuve du bitter, venu directement de chez le marchand de vins le plus proche de la Loge maçonnique, dont il constitue souvent l’une des plus éclatantes lumières.

Page 140, l’épreuve suprême de l’Initié, la seule qui fût réellement dangereuse pour sa vie, s’il faut en croire Jamblique. Laissons parler Christian :
Les plis d’une tenture verte… s’écartaient lentement au fond de la chambre pour découvrir une galerie où se croisaient des jeunes femmes dansantes. C’étaient les filles des Mages, élevées dans le Sanctuaire et consacrées à Isis jusqu’au jour où elles recevaient un époux. Ces apparitions séductrices portaient un masque attaché à leur front par un cercle d’or, afin que l’initié ne pût les reconnaître plus tard, s’il triomphait de l’épreuve.
… Si par le moindre signe de faiblesse, l’imprudent osait profaner la pureté des Mystères, un Néocore qui s’était glissé derrière lui… le frappait d’un coup mortel. S’il demeurait immobile et recueilli. les Mages venaient en procession féliciter leur nouveau frère d’avoir triomphé de l’épreuve surhumaine qui avait surpris sa vertu sans la faire chanceler. (CHRISTIAN, loc. cit.)

Les épreuves isiaques sont aussi décrites tout au long par le F.:. Clavel. (Histoire pittoresque de la Franc-Maçonnerie)

Il place l’entrée des Galeries sacrées, non plus aux pieds du Sphinx, mais à une ouverture pratiquée sur la seizième marche de la Grande Pyramide, sans nous dire d’ailleurs où il a puisé ce renseignement si précis.

Les épreuves « par le feu, par l’eau et par l’air », nous sont donc narrées par Clavel, qui énumère soigneusement les divers prêtres d’Isis revêtus de leurs insignes mystérieux pour recevoir le nouvel Initié.
… Un quatrième, dit-il, portait le crible sacré à travers lequel se faisait le triage des âmes, et qui désignait ainsi l’Initiation. Un autre était chargé de la Ciste ou corbeille sainte… (F.:. Clavel, loc. cit.)
Je suis obligé, au sujet du Symbolisme de la Ciste, de renvoyer au texte du F.:. Clavel. Il s’agit là d’emblèmes naturalistes qui se retrouvent d’ailleurs dans tous les autres Mystères et se sont perpétués jusqu’à nos jours, ainsi que nous l’indiquerons discrètement au cours de cette étude.
Page 303, le F.:. Clavel cite Porphyre qui a conservé un fragment de Chérémon, prêtre égyptien, nous apprenant que les mystagogues de sa nation interprétaient le mythe d’Isis et d’Osiris par l’astronomie.
Page 304, un curieux passage de Clément d’Alexandrie, le savant docteur chrétien, qui, selon Clavel, avait été initié à tous les mystères :
Tous ces mystères qui ne nous présentent que des meurtres et des tombeaux, toutes ces tragédies religieuses avaient à peu près un fonds commun différemment brodé ; et ce fonds était la mort et la résurrection fictives du Soleil, âme de l’Univers, principe de vie et de mouvement dans le monde sublunaire. (F.:. Clavel loc. cit.)

… Caracalla, dit Clavel, consacra des sommes énormes à la construction de temples dédiés à Isis. Le plus magnifique de tous était celui qu’il avait érigé dans le champ de Mars et où se célébraient les mystères de l’Initiation (1). La protection de ces tyrans fut fatale aux mystères isiaques. Jusqu’alors, ils s’étaient du moins garantis des pratiques obscènes; mais à partir de ce moment, ils devinrent le théâtre de la plus honteuse débauche…

Les mystères de l’Égypte sont la source commune de tous les mystères du paganisme… Le récipiendaire y représente le Soleil. Comme cet astre, il naît, il grandit et il meurt fictivement sous les coups d’un ennemi puissant, figure de l’hiver qui le frappe… mais bientôt un autre Soleil se lève radieux, qui va de nouveau répandre l’abondance sur la terre… (F.:. Clavel, loc. cit.)

(1) Pour tout ce qui louche aux mystères antiques, le F.:. Clavel s’est inspiré de fa façon la plus large, d’un savant ouvrage dû au baron de Sainte-Croix, de Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres et intitulé : Mémoires pour servir à l’histoire de la Religion secrète des anciens Peuples, etc. (A Paris, chez Nyon.rue du Jardinet. 1784.)
Tandis que Le F.:. Clavel se garde bien de citer les sources de sa précieuse érudition, de Sainte-Croix, au contraire, renvoie à chaque instant aux auteurs grecs et latins sur l’autorité desquels il s’appuie.
En dehors de tonte autre raison, ce nous en est une pour citer au fur et à mesure les passages où le F.:. Clavel, cette colonne de la Maçonnerie, s’est livré à un facile démarquage aux dépens du baron de Sainte-Croix. Ce dernier donne cette glose :
Apud templum Isidis Lena conciliatricis : quia in hortis templorum ejus adulteria committuntur. (Schol. Juve. ad. L. ϵ.)
Et il ajoute : « On y vit (l’Empereur Commode) la tête rase, avec la figure d’Anubis sur les épaules et se servant de son museau de chien pour assommer les assistants. D’autres fois, il forçait les malheureux initiés de se frapper la poitrine jusqu’à courir un danger imminent de mort. » {De Sainte-Croix, loc. cit.; d’apres Ael. Lamprid. Hist. August., t. 1, et Ael. Spartian. 1bid.)

Après avoir expliqué selon le dogme de l’Héliolatrie (culte solaire) l’emblème saint que les Prêtres égyptiens offraient alors à la vénération des fidèles pour rappeler la fécondance céleste, Clavel expose l’adaptation des Mystères d’Osiris à la théogonie phénicienne et leur transformation dans les Mystères d’Adonis qui se propagèrent par la suite dans toute l’Asie, la Grèce et la Sicile et qui sont un mélange de diverses traditions empruntées aux religions égyptienne, chananéenne et chaldéenne.

Nous avons retrouvé la source du chapitre en question de l’Hist Pittor. de la F.:.Maç.:. dans les mémoires de Sainte-Croix qui donne, d’après Lucien, ce détail caractéristique :
… Le huitième jour, on exposait au grand jour la statue du jeune Dieu (Adonis), et tout le monde se rasait la tête, suivant le costume égyptien dans les fêtes d’Apis. Les personnes du sexe qui refusaient de se conformer à cet usage, étaient, dit-on, mises en vente… infâme marché, dont le produit était appliqué aux frais des sacrifices consacrés à Vénus. (Lucian. De Deâ Syr. 56. — Mém., etc.)
Les singularités de ce culte n’ont pas besoin d’être relatées davantage. Les emblèmes naturalistes y jouaient d’ailleurs un rôle excessif. (DE SAINTE-Croix, loc. cit.)

Il en était de même dans les Mystères des Cabires de Samothrace, originaires eux aussi de Phénicie.

Les Cabires, en effet, étaient des dieux phéniciens, Kabirim, les puissants ; Clavel a résumé ici de Sainte-Croix. (Mém.)

La plupart des cérémonies mystérieuses se faisaient la nuit; quelques-unes même dans un antre, et le secret le plus inviolable en dérobait la connaissance aux profanes. Il paraît par un endroit d’Hérodote (1. Il, ch. 11) qu’on apprenait aux initiés plusieurs traditions historiques sur les Pélasges et sur l’adoption que firent les Athéniens de plusieurs objets de leur culte… Ce même Culte… devait son crédit à un dépôt mystérieux, confié, disait-on, par Cérès aux deux premiers Cabires. En quoi consistait-il? Quel usage en faisait-on? — Voilà, assurait Pausanias, ce que je ne puis divulguer. Il est seulement permis de dire que les Mystères des Cabires sont fondés sur un présent que leur fit Cérès. (Pausan. Messen., ch. 1.) — (Voir DE SAINTE Croix, loc. cil.)

L’an 18 de notre ère, les Mystères cabiriques n’avaient rien perdu de leur célébrité, et Germanicus voulut s’y faire initier. (F.:. Clavel, loc. cit.) (1). Les mêmes mythes ont aussi donné naissance aux MYSTÈRES DES DACTYLES (en Phrygie), DES TELCHINES (à Rhodes), DES CURÈTES (en Crète) (2).

.…. Le récipiendaire, couvert de la peau d’un agneau noir, représentait la victime. (Voir F.:. Clavel, loc. cit., qui constate dans tous ces mystères les mêmes rites naturalistes que dans les Initiations d’Osiris, d’Adonis et des Cabires.)

La Phrygie possédait encore les Mystères des Corybantes où l’on honorait Atys, fils de Cybèle.

Au sujet de cette déesse, de Sainte-Croix émet ces très justes remarques :

La Terre, Ops, Rhéa, la Mère des Dieux, Adgestis, la bonne Déesse, la grande Déesse phrygienne, ete., étaient les noms d’une même divinité à laquelle on donnait encore les épithètes de Cybèle, de Bérécynthienne, Dyndiménienne, Idéenne, Pylérienne, Pessinontide, etc., suivant les lieux qui lui rendaient un culte particulier : elle ne différait point d’Isis, adorée chez les Égyptiens, d’Astarté chez les Phéniciens et de Cérès chez les Athéniens (à Eleusis).. (Mémoires, etc., DE SAINTE-CROIX)

Le temps de la célébration des Mystères (de la Mère des Dieux} se trouvait fixé à l’Équinoxe du printemps. (Julian, Orat. V. in honor.Matr. Deor.). Le récipiendaire répondait aux questions du Mystagogue par ces paroles : J’ai mangé du tambour, j’ai bu de la cymbale et j’ai porté le Cernos, [espèce de vase de terre dans lequel étaient des pavots blancs, du froment, de l’huile et du miel]… (De SAINTE-CROIX, loc. cit.)

(1) Ceci est emprunté à de Sainte-Croix (loc. cit.) d’après Tacite. Annal., 1. H, ch. LIV.

(2} Selon Éphore, Minos emmena les Curètes avec lui dans l’île de Crète (Dion, 1 V, § 64) qui porta même leur nom. (Pline, 1. 1V, ch. xx.). M.le Président des Brosses avance que « les Curètes sont les anciens Prêtres de cette partie de l’Europe, voisine de l’Orient et de la Grèce, assez semblables aux Druides des Celtes, aux Saliens des Sabins, aux Sorciers ou Jongleurs de Laponie, de Nigritie ou à ceux des Sauvages de l’’Amérique;. le plus célèbre Collège de ces Jongleurs était en Crète… » (Cité par de Sainte-Croix, loc. cit.)

Remarquons en passant que Minos, dans les légendes grecques, est un personnage éminemment égypto-phénicien. Ce qui donne une force plus grande encore à l’opinion émise par plusieurs auteurs, que presque tous les Collèges de prêtres dont il est ici question sont d’origine phénicienne.

L’Empereur Julien l’Apostat qui s’est vainement efforcé de donner un nouvel éclat au Culte et aux Mystères de la Mère des Dieux à Pessinunte, prétendait que les cérémonies secrètes y représentaient les travaux de la moisson (??). De Sainte-Croix ajoute : « Ce Prince, trop vanté de nos jours parce que ses ouvrages ne sont point assez lus, écrivit à Arsace, Grand Prêtre de Galatie, pour l’assurer qu’il accorderait sa protection aux habitants de Pessinunte s’ils se rendaient propice cette divinité; que si au contraire ils la négligeaient, il leur ferait ressentir les effets de son indignation. » (Julian. Epist. XLIXX — Voir de Sainte-Croix, loc. cit.)

Voilà bien le fait d’un Prince Philosophe!

Le F.:. Clavel déclare que :

Les Galles (autre catégorie de prêtres de Cybèle) se portaient à des actes de frénésie qu’on a peine à comprendre (1)… Introduite à Rome pendant la deuxième guerre Punique, cette Initiation se propagea dans tout l’Empire, et elle y subsista jusqu’aux derniers temps du Paganisme, (F.:.Clavel, loc. cit.)

(1) Le passage qui, dans Clavel, a trait au fanatisme sanglant des Galles est purement et simplement copié dans l’ouvrage de Sainte-Croix! (Mém., etc., d’après Lucian., Dial., Deor XII, § 1. — Apul. Métam., |. VIII, ch. IX.

Les Mystères de Cotytto qui avaient beaucoup d’analogie avec ceux d’Atys et de Cybèle, furent d’abord établis dans la Thrace. De là, ils furent portés dans la Grèce, à Chio, à Corinthe et à Athènes.
— On sait seulement que les Initiés prenaient le nom de Baptes, sans doute à cause de quelque ablution préparatoire. De la Grèce, les Mystères de Cotytto passèrent à Rome, à l’époque de la fondation de cette ville, s’y modifièrent, y prirent le nom de mystères de la bonne Déesse et y furent spécialement consacrés aux femmes. Les Vestales en étaient les prêtresses. (F.:.Clavel, loc. cit.)

Clément d’Alexandrie, dans une curieuse dissertation que nous croyons devoir passer sous silence, a montré sur quel singulier dépôt veillaient les Vestales! Non moins singuliers étaient les rites qui s’accomplissaient dans les Mystères de la bonne Déesse !

Si l’on en croit Juvénal, les vertus Antiques n’y étaient guère pratiquées !

Nota bonæ secrela deæ, quum tibia lumbos
Incitat, et sornu pariter vinoque feruntur
Altonitæ, crinemque rotant, ululantque Priapi
Meenades. O quantus tunc illis mentibus ardor
Concubitus! Quæ vox saliente libidine! Quantus
Ille meri veteris per crura nodentia torrens!
Lenonum ancillas posità Saufella coronà
Provocat, et tollit pendentis premia coxce :
Ipsa Medullinæ frictum crissantis adorat,
Palmam inter dominas virtus natalibus iequat 
Nil ibi per ludum simulabitur; omnia fient
Ad verum, quibus incendi jam frigidus aevo
Laomedontiadis et Nestoris hernia possit.
Tunc prurigo moræ impatiens, tune femina simplex,
 Et toto pariter repetitus elamor ab antro :
Jain fas est, admitte viros! Dormitat adulter ?
Llla juhet sumpto juvencim properare cucullo.
Si nihil est servis incurritur.….
(Juven., Satyr. VI, v. 314.)

Les Mystères de Cérès, pratiqués à Éleusis (les Eleusinies), et répandus à Rome dès Sylla, en Angleterre dès l’empereur Hadrien, étaient, eux aussi, dérivés des mystères d’Isis : presque tous les écrivains de l’Antiquité qui ont traité de ces matières, avouent, nous dit Clavel, l’identité d’Isis et de Cérès ainsi que de leurs fils, Horus et lacchos. Certains rituels ont été divulgués, et quelques fragments parvenus jusqu’à nos jours ont permis de décrire assez complètement le cérémonial de l’initiation éleusinienne. Comme dans les Mystères d’Isis, on y retrouve l’origine des épreuves imitées dans la Franc-Maçonnerie. (Cf.F.:. Clavel, loc. cit., qui a emprunté toute son érudition à de Sainte-Croix, loc. cit.)

La dernière et suprême Initiation dans les Éleusinies s’appelait Époptée; elle s’ouvrait par de terribles serments, avec un véritable tuilage, comme disent les Maçons. On demandait aux assistants : « Avez-vous mangé du pain ? » Chacun répondait : « Non ; j’ai bu du cycéon; j’ai pris de la ciste; après avoir travaillé, j’ai mis dans le calathus, ensuite du calathus dans la ciste. » L’Aspirant voyait lui apparaître des fantômes à figure de chien avec diverses formes monstrueuses, au bruit de la foudre et à la lueur des éclairs ; Plutarque nous apprend (Thémistocl.} que les terreurs de l’Initié à ce moment en faisaient presque un mourant, mais qu’elles s’apaisaient bientôt à l’aspect de la Statue de la Déesse, resplendissante de lumière (1).

Si les Eleusinies que nous venons de décrire brièvement étaient spéciales aux hommes, tes Thesmophories, liées également au culte de Cérès, constituaient des mystères réservés aux femmes.

Les Prêtresses attachées aux mystères de Cérès et de sa fille, s’appelaient en général Hiérophantides… Couronnées d’if et de myrte, conne les autres ministres d’Eleusis, elles avaient à leur tête une Prêtresse, tirée de la famille des Philléides, dont l’emploi était d’initier les personnes de son sexe. (SuidAs, in v. Dueôu) (2), (de SAINTE-CROIX, loc. cit.)

(1) Je donne simplement ici les indications bibliographiques concernant le Symbolisme usité dans les Mystères d’Eleusis. — De Sainte-Croix, loc. cit., — Diod. de Sicil. (1. 1, § 22, S8.) — Jamblic. (De Myster. Megypt., HA, Ch. xr.) — Ce Symbolisme est d’ailleurs le même que celui des mystères isiaques. Des scrupules qu’on nous pardonnera, nous empêchent d’insister.

(2) Certaines particularités de cette Initiation devaient produire bien des désordres, ainsi que saint Épiphane semble l’insinuer. (Aversus Hæreses, 1, 111.) — (De Sainte-Croix, loc. cit.)

Le F.:. Clavel (loc. cit.), s’inspirant de Sainte-Croix (Mém.), donne sur les rites des Thesmophories des détails qu’il convient d’omettre ici. Contentons-nous de dire que l’auteur grec Cléomède compare les discours… libres des Épicuriens à ceux des femmes célébrant les Thesmophories! Dans sa comédie des Thesmophoriazuses, Aristophane accuse les Initiées d’ivrognerie et de méfaits de diverse nature (v, 637, 211, etc.); il contribue ainsi à nous instruire sur le degré de moralité que présentaient ces Mystères pratiqués chez le peuple le plus policé et le plus intelligent de l’Antiquité!

Si nous arrivons maintenant aux Mystères de Bacchus (1), nous y trouvons un dévergondage encore plus fantastique, s’il est possible !

Tout s’y passait dans les ténèbres de la nuit (EuripidE, Bacch., v, 485), et il était défendu d’en révéler les sacrifices mystérieux par une loi. (Pausanias, Corinth., ch. XXXVII.) On sacrifiait un porc, la créonomie, partage des viandes, se faisait aux Initiés par le ministère de l’Hiérophante… Ce partage était commémoratif et avait rapport à la fable de Bacchus, mis en pièces par les Titans, représenté à Chio et à Ténédos par un homme qu’on y immolait. (PORPHYRE, de Abstin, 1. 11, § 56.) Une troupe de jeunes canéphores portaient dans la procession des corbeilles ou cistes mystiques… (De Sainte-Croix)

Dans sa comédie les Acharnaniens, Aristophane a donné d’édifiants détails (v, 241, 259, 260), sur les monstruosités des rites dionysiens. Ici on nous permettra de citer (en latin) le grand saint Augustin en témoignage :

In Italiae compitis quædam dicit (Varro)
sacra Liberi (vel Bacchi)
celebrata cum tantä licentià turpitudinis,
ut in ejus honorem pudenda 
virilia colerentur.. 
(De civit. Dei, lib.VII, cap.XXI.)

(1) À propos de ces Mystères, ou Dionysies, ne résistons pas au plaisir de confronter l’épreuve de l’air,

selon de Sainte-Croix (1784),

« L'aspirant, en voltigeant où s'élançant de haut, tâchait de saisir une saisir à quelque distance une figure.
figure... faite avec des fleurs et qui était suspendue à une branche de pin, entre pendue à une branche de pin, entre des colonnes.. »
										(Mém.)

selon le F.:. Clavel (1843),
« … Il s’élançait d’un lieu d’un lieu élevé pour saisir à quelque distance une figure.. faite avec des fleurs et qui était suspendue à une branche de pin, entre deux colonnes... »
								(Hist.Pittor.)

On connaît maintenant la source de l’érudition de Clavel touchant les mystères de l’antiquité! Il copie vraiment avec un sans-gène par trop remarquable : si encore il avait reproduit les renvois de Sainte-Croix aux sources !

Tite-Live (I. XXXIX, ch.XV-XVI) cite à propos de ces Mystères et des scandales abominables qu’ils causèrent à Rome, d’énergiques paroles de Posthumius au Sénat :
Primum igitur mulierum magna pars est, et is fons mali hujusce fuit : deinde simillimi feminis mares, stuprati et constrnpatores, fanatici vigiles… Quidquid his omnis libidine, quidquid fraude, quidquid scelere peccalum est, ex illo uno Sacrario scitote ortum esse. (An de Rome 566, 188 av. J.-C.)

Beaux rites vraiment et beaux mystères, qui aboutissent ainsi à la putréfaction morale de tout un peuple !

Cette même licence s’était introduite d’une manière si effrénée dans les fêtes sabasiennes (Sabasius, nom phrygien donné à Bacchus-Iacchus), qu’Aristophane crut devoir, dans une comédie intitulée Sabasius, proposer de chasser toutes les divinités étrangères à cause de leurs cérémonies nocturnes. (Cicer., de Natur. Deor, 1. LL, § 23.) (De Sainte-Croix)

Les initiés faisaient entendre l’acclamation Evoi, Saboi, hyès, attès, attès, hyès.…. Le culte de Bacchus Sabasius subsista jusqu’aux derniers temps du paganisme, mais dégénéré et souillé par les plus honteuses pratiques. On voyait les initiés, couverts de peaux de chèvres, se livrer ostensiblement à la débauche, courir çà et là comme des ménades, mettre en pièces des chiens et commettre les plus indécentes extravagances. (F.:. Clavel loc. cit)

Observons en passant que cette dernière phrase soulignée est tout uniment empruntée à de Sainte-Croix (loc. cit., p. 440).

Il est amusant d’ailleurs de voir le bon F.:. Clavel s’efforcer d’expliquer les rites les plus abominables, comme celui du Jupiter-Serpent, par des calembredaines soi-disant astronomiques. Un culte que nous trouvons absolument ordurier dès l’époque d’Aristophane, il le qualifie, par un adorable euphémisme, de dégénéré aux derniers temps du paganisme ! C’est généralement ainsi que les Francs-Maçons écrivent l’histoire !

Le F.:. Clavel a traité aussi des Mystères Orphiques (loc. cit., p. 320). Il s’est inspiré pour cela d’un curieux chapitre de Sainte-Croix qui cite un passage de Démosthènes, invectivant Eschine en ces termes :
« La nuit, vous couvriez les mystes d’une peau de faon, vous les arrosiez d’eau lustrale et les frottiez avec de la boue et du son…
… Vous les conduisiez pendant le jour, ces belles troupes d’initiés couronnés de fenouil et de peuplier, en pressant dans vos mains des serpents joufflus, les élevant sur la tête et criant de toutes vos forces : Evoi, Saboi…! Vous dansiez au son de ces paroles : hyès, attès, attès, hyès! Les vieilles vous prodiguaient les titres de chef, de conducteur, de porte-lierre, de porte-van, de porte-ciste.…., » (Voir de Sainte-Croix)

On voit par là dans quel discrédit étaient tombés les Orphiques au temps de Démosthènes. Cependant, comme nous l’apprend l’académicien Fréret, cité par de Sainte-Croix et pillé par le F.:. Clavel, les Platoniciens des premiers siècles de l’Église, qui n’étaient au fond que des Orphiques, s’efforcèrent de remettre en honneur le culte orphique de Bacchus, sous le nom de Phanès, le plus grand des dieux. (Voir de Sainte-Croix)

Il est un point très important que nous ne pouvons passer sous silence : c’est ce fait que la peine de mort était toujours prononcée contre les infracteurs des lois qui protégeaient le secret des mystères.
De Sainte-Croix en donne les meilleures preuves, d’après de nombreux auteurs grecs et latins. A Athènes, le tribunal des Eumolpides jugeait en première instance dans les cas de sacrilège, etc… On a conservé une curieuse plaidoirie de Lysias contre Andocide et trois cents Athéniens. Andocide était accusé d’avoir — revêtu d’habits sacerdotaux — découvert aux profanes des choses sacrées et prononcé devant eux des termes mystérieux… mais le crime fut rejeté sur Alcibiade. (Voir Plutarque, Alcibiad.) Quelques siècles après (Pausan, Attic., ch. II), on montrait encore la maison où s’était commise cette profanation, qui avait consisté à représenter dans l’ivresse les mystères d’Eleusis. (Mém., de Sainte-Croix)

La tête de Diagoras fut mise à prix, parce qu’il avait divulgué l’objet secret de ces cérémonies sur lesquelles il s’était même permis d’indécentes railleries. (Aristoph, les Oiseaux, v. 1073.) (Mémoires)

Eschyle faillit être assommé par le peuple, pour avoir eu la témérité de laisser échapper dans ses tragédies quelques traits sur les mystères.
Tite-Live (1. XXXI, ch. XIV) raconte que deux jeunes Acharnaniens qui s’étaient glissés par hasard dans le temple d’Eleusis furent massacrés sur-le-champ. (Mém)

Les terribles vengeances suspendues sur la tête des faux-frères dans les Rites maçonniques, constituent donc ici une analogie de plus entre les mystères de la franc-maçonnerie et ceux des temples antiques. Le F.:. Ragon a justement fait observer que dans les anciens mystères on frappait l’esprit de l’initié, pour lui faire prendre par l’effroi des supplices, la résolution de bien observer son serment. (Cours philosophique, etc., 1841) Et il donne une liste analogue à celle dressée par de Sainte-Croix, au sujet des dangers courus par les Révélateurs des secrets.

Le cycle des anciens mystères — au point de vue Initiation — se trouvera complètement parcouru quand nous aurons traité du Druidisme.

(A suivre)

F.:. : signifie Frère Franc-Maçon

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En effet, ce n’est pas contre l’homme que nous avons à lutter, mais contre les puissances, contre les autorités, contre les souverains de ce monde de ténèbres, contre les esprits du mal dans les lieux célestes.
Éphésiens 6:12

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